Des enseignantes manifestent devant le bureau de François Legault
La Presse Canadienne|Publié le 22 Décembre 2023Les 66 000 membres de la FAE sont en grève illimitée, tandis que le front commun menace d’emboîter le pas au début de 2024 si les progrès ne sont pas suffisants aux tables de négociations. (Photo: La Presse Canadienne)
Des centaines de manifestants se sont rassemblés vendredi midi devant les bureaux du premier ministre François Legault à Montréal en appui au personnel du milieu de l’éducation.
Un peu après 11 h, des autobus scolaires remplis de grévistes et de sympathisants se sont stationnés devant les bureaux du premier ministre Legault et à midi, les manifestants ont bloqué la circulation sur la rue Sherbrooke, coin McGill College.
«Plus la CAQ nous méprise, plus on se mobilise», s’est mis à scander la foule, constituée de femmes en majorité.
Au son des klaxons et des trompettes, plusieurs d’entre elles agitaient des drapeaux rouges de la Fédération autonome de l’enseignement (FAE), en grève illimitée depuis le 23 novembre.
«Je suis passionnée par mon métier, mais je dois faire des choix pour ma famille et puis je suis en réflexion, entre autres pour savoir si je reste dans ce métier−là», a expliqué Rosalie Gaudreault, une enseignante qui manifestait et qui est «tombée au combat à la fin mai».
Cet arrêt de travail aurait pu être évité, selon elle, s’il y avait une «meilleure composition de la classe».
Cette demande est au cœur des revendications des enseignants.
«Moi, entre autres, sur vingt−trois élèves, j’avais dix−sept élèves à besoin, avec adaptation scolaire. J’avais une éducatrice spécialisée dans la classe, mais elle n’était pas à temps plein», a expliqué l’enseignante de 3e année en ajoutant qu’à son école, «les professeurs ont besoin d’aide».
Rosalie Gaudreault travaille dans une école de Laval, «dans un milieu défavorisé et multiculturel» où «il y a des enfants qui n’ont pas été scolarisés pendant trois ans parce qu’ils ont vécu la guerre».
La FAE réclame notamment plus de classes spécialisées pour offrir les services appropriés aux élèves qui ont des besoins particuliers.
«On a des enfants de maternelle qui arrivent de l’étranger, mais il n’y a pas de classe d’accueil pour le préscolaire. Certains enfants ne parlent pas français, certains ne sont pas propres, il y en a qui n’ont jamais vu de livres de leur vie, on a beaucoup de besoins», a expliqué l’enseignante à La Presse Canadienne.
Rosalie Gaudreault a tenu à préciser qu’elle «aime sincèrement ce qu’elle fait» et qu’elle veut continuer à enseigner.
«J’aimerais simplement ne pas tomber en épuisement à nouveau», a-t-elle expliqué.
«Ce n’est pas de la faute aux profs si on est encore dehors aujourd’hui», a indiqué Annie Bélanger, enseignante de français, à La Presse Canadienne.
«C’est le gouvernement qui ne bouge pas et qui ne veut pas améliorer la composition de la classe. Tant qu’il n’y aura pas d’amélioration dans la composition de la classe, on va continuer d’avoir des enseignantes qui tombent au combat», a ajouté l’enseignante.
Même si le gouvernement et la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE), un regroupement syndical distinct de la FAE, ont convenu vendredi matin, d’une proposition de règlement sectoriel, Annie Bélanger, qui est représentée par la FAE, ne semblait pas très optimiste en ce qui a trait aux négociations.
«Ça fait 22 jours qu’on est en grève et ça fait quatre shows de boucane qu’on a, alors moi, je garde mes réserves. J’ai de l’espoir, mais en même temps, je me dis qu’il ne faut pas en avoir trop».
L’enseignante en grève a ajouté que la FAE, dont la majorité des membres sont des professeurs qui enseignent à Montréal, n’a pas exactement «les mêmes priorités» et les mêmes revendications que les autres syndicats d’enseignants.
«Car on n’a pas nécessairement les mêmes problématiques», a expliqué Annie Bélanger.
Des artistes prennent la parole
Plusieurs personnalités du milieu artistique ont participé à cette manifestation présentée comme un «grand rassemblement citoyen pour sauver l’école publique».
Le comédien Emmanuel Bilodeau, qui s’est qualifié de «parent fâché» dont «la limite est atteinte», a notamment pris la parole devant la foule.
«Les enseignants et enseignantes sont incapables en ce moment d’enseigner à la hauteur de leurs rêves avec un gouvernement qui ne semble pas prendre leur destinée au sérieux. En campagne électorale, M. Legault a répété que l’éducation était sa priorité. Je ne comprends pas. C’est quoi la stratégie actuelle du gouvernement?», a demandé le comédien.
Emmanuel Bilodeau a indiqué qu’il «propose humblement des états généraux sur l’éducation, mais d’abord un État généreux pour l’éducation».
Vincent Bolduc, Catherine Ethier, Simon Boulerice, Sophie Cadieux, Anaïs Barbeau−Lavalette, Vincent−Guillaume Otis et Isabelle Blais faisaient également partie des artistes présents sur une tribune installée sur le trottoir, en face du bureau du premier ministre.
Les 66 000 membres de la FAE sont en grève illimitée, tandis que le front commun menace d’emboîter le pas au début de 2024 si les progrès ne sont pas suffisants aux tables de négociations.
Stéphane Blais, La Presse Canadienne