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Le Bloc lance un ultimatum aux libéraux

La Presse Canadienne|Mis à jour hier à 16h15

Le Bloc lance un ultimatum aux libéraux

Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet (Photo: Adrian Wyld La Presse Canadienne)

Ottawa — Le Bloc québécois a lancé mercredi un ultimatum au gouvernement libéral minoritaire s’il veut conserver son appui lors des prochains votes susceptibles de déclencher une élection: il réclame «la mise en œuvre irréversible» de deux de ses projets de loi d’ici au 29 octobre.

La première des deux propositions législatives vise à augmenter la pension des aînés de 65 à 74 ans et l’autre à exclure la gestion de l’offre de toute future négociation à caractère commercial.

«Si ces deux projets de loi ne sont pas établis sous forme de lois irréversibles le 29 octobre 2024, le Bloc québécois entreprendra (…) des discussions avec les autres oppositions en vue de renverser le gouvernement», a déclaré le chef du Bloc, Yves-François Blanchet, lors d’une mêlée de presse en marge de la réunion de son caucus. S’il obtient gain de cause, le Bloc québécois aidera les libéraux à survivre à tout vote de confiance d’ici à Noël.

Le premier ministre Justin Trudeau a dit qu’il est «très ouvert à continuer de travailler avec d’autres membres dans [la] Chambre pour livrer pour les aînés, pour livrer pour nos agriculteurs».

Il a toutefois, une fois de plus, reproché au Bloc québécois de s’opposer au programme fédéral offrant des prestations pour les soins dentaires. «Plusieurs aînés au Québec et ailleurs au pays à qui j’ai parlé cet été m’ont dit qu’ils ont sauvé des centaines de dollars avec des visites chez le dentiste qui ont été couvertes par le programme canadien de soins dentaires. Et malheureusement, ils ne comprennent pas pourquoi le Bloc québécois s’oppose», a-t-il lancé au cours de la période des questions.

M. Blanchet a martelé que «la raison fondamentale» de son approche est de «profiter, littéralement, des circonstances pour faire des gains pour le Québec». Il a balayé du revers de la main toute idée qu’il souhaite plutôt soutenir le gouvernement.

S’il lance l’ultimatum du 29 octobre, M. Blanchet assure que son parti n’a pas l’intention d’appuyer n’importe quelle motion de censure après cette date, c’est-à-dire une motion qui, si adoptée, entraîne une élection.

«On ne sera pas assez pas fins pour faire tomber le gouvernement sur n’importe quoi. On a une éthique. On est des gens responsables», a-t-il dit.

À son avis, l’adoption d’une motion de censure portant sur des «enjeux identitaires» est vouée à l’échec puisque les autres partis d’opposition ne l’appuieraient pas.

Les libéraux ont survécu en après-midi à un premier vote visant à faire tomber leur gouvernement minoritaire depuis que le Nouveau Parti démocratique (NPD) s’est retiré de leur entente avec eux. Il y avait peu de suspense puisque le Bloc québécois et le NPD avaient fait savoir, la semaine dernière, qu’ils s’opposeraient à la motion conservatrice qui a été soumise aux voix.

Il n’est «absolument pas dans les cartons» que les bloquistes soutiennent le gouvernement libéral jusqu’à la fin prévue de son mandat, en octobre 2025. L’entente avec le NPD et les libéraux prévoyait un tel appui jusqu’à ce que des élections à date fixe aient lieu.

Le Bloc veut tirer parti de son rapport de force augmenté au sein du Parlement minoritaire pour amener le gouvernement à hausser les prestations de sécurité de la vieillesse des aînés de 65 à 74 ans au niveau de celles versées à ceux de 75 ans et plus, avec C-319.

Selon un rapport du directeur parlementaire du budget, la mesure coûterait 3,1 milliards $ au trésor cette année, et davantage à chaque année suivante.

M. Blanchet estime que le gouvernement n’a qu’à rediriger de l’argent versé aux pétrolières pour le mettre dans les poches des aînés. «S’il veut savoir où est l’argent, qu’il aille le chercher dans les subventions accordées aux pétrolières.»

Puisque le projet de loi C-319 a une incidence budgétaire qui émane d’un député, les bloquistes ont besoin que le gouvernement lui fasse accorder la recommandation royale. Sans cela, le règlement de la Chambre prévoit que le président mettra un terme aux délibérations et le jugera irrecevable.

L’autre projet de loi au cœur de cet ultimatum, celui sur la gestion de l’offre, porte le numéro C-282. Il a franchi toutes les étapes à la Chambre des communes et est présentement à l’étude par le Sénat.
Le chef adjoint du NPD, Alexandre Boulerice, a indiqué que sa formation politique est en faveur des projets de loi du Bloc. Or, pas question de s’arrimer sur l’échéancier fixé par M. Blanchet, a-t-il dit.
«Notre plan de match reste exactement le même. Si M. Blanchet veut se peinturer dans le coin, veut se fixer un propre calendrier ou des lignes rouges dans lesquelles il va pouvoir s’enfarger par la suite, ce n’est pas mon problème», a lancé M. Boulerice en mêlée de presse.

Ainsi, le NPD continuera d’analyser chaque vote au cas par cas, au fur et à mesure.

Selon l’élu québécois du NPD, il est clair que le Bloc réagit au programme de soins dentaires qui profiterait particulièrement à de nombreux Québécois.

«Je comprends que le Bloc panique un peu parce que c’est les Québécois qui ont le plus profité du nouveau programme que nous, on a forcé les libéraux à mettre sur pied», a-t-il soutenu.

Si une motion de censure est adoptée, le gouvernement serait défait et les Canadiens seraient très probablement convoqués à des élections générales.

Jeudi, les conservateurs mettront de l’avant une nouvelle motion de ce type lors d’une de leur journée d’opposition. Cette procédure permet à l’opposition officielle de forcer la tenue d’un débat en Chambre sur une motion de son cru. Le texte fait ensuite l’objet d’un vote dans les jours suivants.

Par Émilie Bergeron et Michel Saba