Le gouvernement Trudeau ne semble pas se fixer de plafond devant l'ampleur des fonds nécessaires en ces temps de crise.
Après les petites et moyennes entreprises (PME), d’autres secteurs ébranlés par la pandémie de COVID-19 pourraient bien recevoir un coup de pouce de la part du gouvernement Trudeau, qui ne semble pas vouloir fixer de limite quant à l’ampleur des deniers publics nécessaires pour traverser la crise.
«Je vous dirais qu’il n’y a pas de plafond sur ce que nous pourrions devoir investir pour résoudre le problème», a lancé le ministre des Finances, Bill Morneau, vendredi, au cours d’une conférence de presse où il était flanqué du gouverneur de la Banque du Canada, Stephen Poloz.
Ottawa a dévoilé un bouquet de mesures de plusieurs dizaines de milliards de dollars qui comprend notamment une subvention visant à défrayer jusqu’à 75% des salaires des employés des PME admissibles, par rapport à 10% auparavant. Elle concerne les compagnies qui poursuivent leurs activités _ même au ralenti – et qui continuent à retenir des travailleurs. Ceux qui ne pourront plus du tout travailler auront la prestation canadienne d’urgence à leur disposition.
L’initiative, qui a déjà été adoptée par plusieurs États européens et qui était réclamée par les milieux patronaux et syndicaux, est valide pour trois mois et rétroactive au 15 mars.
Ce plan a été dévoilé après que la banque centrale eut procédé à une autre baisse inattendue d’un demi-point de pourcentage de son taux d’intérêt directeur, qui a été ramené à 0,25 %, ainsi que la publication d’un rapport du directeur parlementaire du budget à l’effet que le déficit pourrait atteindre 112,7 milliards $ au terme de l’exercice.
Mais malgré tout, M. Morneau a affirmé, au cours de la conférence de presse, que son gouvernement discutait également avec les entreprises du secteur énergétique et les compagnies aériennes – qui ont procédé à des licenciements massifs en raison de la fermeture des frontières – et qu’il pourrait prochainement y avoir des annonces.
«Nous allons agir de manière appropriée (à la crise), a dit le grand argentier du pays. Nous sommes dans une posture fiscale enviable.»
M. Morneau a estimé que les mesures dévoilées vendredi totalisaient 95 millions $ en soutien supplémentaire aux entreprises, ce qui fait passer la taille de l’aide destinée aux entreprises à près de 110 milliards $ depuis le début de la pandémie.
Il faudra toutefois patienter encore quelques jours pour connaître l’ensemble des modalités du plan, a indiqué Ottawa, puisqu’il doit encore être peaufiné. Invité à préciser quelles PME seraient admissibles, le ministre fédéral des Finances ne s’est pas avancé.
Même si de nombreuses questions subsistent, syndicats et associations patronales ont réservé un accueil plutôt favorable aux annonces.
«Nous allons devoir attendre pour savoir s’il y a un maximum de dépenses remboursables», a expliqué la présidente-directrice générale de Manufacturiers et Exportateurs du Québec (MEQ), Véronique Proulx, au cours d’un entretien téléphonique.
Au niveau fédéral, une PME compte 500 employés et moins, a-t-elle fait remarquer, ce qui laisse entendre que des entreprises comme Bombardier, BRP et CAE, qui ont effectué d’importantes mises à pied temporaires, n’auraient pas droit aux coups de pouce annoncés.
Idéalement, la subvention aurait été annoncée plus tôt, mais la rétroactivité au 15 mars devrait permettre à des entreprises de rappeler des employés mis à pied temporairement, a estimé le vice-président aux affaires nationales à la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante, Jasmin Guénette.
«Cette mesure permet de conserver un lien d’emploi avec les travailleurs pour les entreprises confrontées à une baisse de l’activité, a-t-il dit. Cela permet de ne pas engorger le système (fédéral) qui n’est pas en mesure de répondre à la demande (pour les prestations d’assurance emploi et d’urgence).»
Dans un communiqué conjoint, la Confédération des syndicats nationaux (CSN) et la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ) ont aussi salué la subvention salariale, mais elles ont demandé, à l’instar d’autres associations patronales, que l’ensemble des compagnies puissent en bénéficier.
Par souci d’équité, la taille des entreprises ne devrait pas être le critère qui détermine pourquoi certains travailleurs auront à se tourner vers l’assurance emploi alors que d’autres pourront bénéficier d’une subvention salariale. Les deux syndicats ont également plaidé pour la mise en place de mécanismes pour s’assurer que les subventions soient «entièrement consacrées à la rémunération des employés».
Les autres mesures dévoilées par Ottawa:
Prêts:
- Le programme permettra l’octroi de prêts sans intérêt pouvant atteindre 40 000 $ pour les PME. Si le remboursement est effectué avant la fin 2022, jusqu’à 10 000 $ de la dette sera radiée.
- Ottawa prêtera également jusqu’à 12,5 milliards $ de plus par l’entremise d’Exportation et développement Canada et la Banque de développement du Canada pour aider les PME en matière de liquidités.
Mesures fiscales:
- Les versements de la taxe sur les produits et services et de la taxe de vente harmonisée ainsi que des droits de douane sont reportés jusqu’au 30 juin. Le gouvernement estime que cela fournira environ 30 milliards $ en liquidités aux compagnies.