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Québec solidaire veut faire payer les pétrolières pour la crise climatique

La Presse Canadienne|Mis à jour le 13 novembre 2024

Québec solidaire veut faire payer les pétrolières pour la crise climatique

Des dizaines de municipalités américaines ainsi que huit États et Washington D.C., ont poursuivi des sociétés pétrolières et gazières ces dernières années. (Photo: Jeff McIntosh / La Presse Canadienne)

Québec solidaire (QS) demande au gouvernement du Québec de poursuivre les grandes pétrolières pour les dommages causés par les changements climatiques.

Les conséquences des changements climatiques au Québec «se font sentir de plus en plus fort» et «ce n’est pas aux Québécois de payer pour ces conséquences», a lancé la future porte-parole de Québec solidaire, Ruba Ghazal, devant le palais de justice de Montréal, mercredi matin.

QS fait valoir que Shell, Suncor, Valero et Exxon, qui vendent du pétrole au Québec, ont trompé le public en minimisant les risques pour le climat que représentent les énergies fossiles et, par conséquent, ils doivent payer pour les dégâts.

«À elles seules, les pétrolières sont responsables du tiers, voire de la moitié des GES mondiaux. Elles doivent payer pour les dommages qu’elles ont causés, c’est une question de justice», a ajouté la députée lors d’un point de presse.

«Tous les partis politiques disent vouloir protéger le Québec des changements climatiques, mais aucun n’a le courage de faire ce qui est nécessaire: faire payer les responsables de la crise climatique», a indiqué Alejandra Zaga Mendez, responsable solidaire en matière d’environnement.


Mensonges et désinformation

Des dizaines de municipalités américaines ainsi que huit États et Washington, D.C., ont poursuivi des sociétés pétrolières et gazières ces dernières années pour leur rôle dans le changement climatique, selon les données du Center for Climate Integrity. 

Ces actions sont toujours en cours devant les tribunaux, notamment une poursuite intentée par la Californie il y a un an contre certaines des plus grandes sociétés pétrolières et gazières du monde, affirmant qu’elles ont trompé le public sur les risques des combustibles fossiles.

Une étude de la revue Science publiée en 2023 montre qu’Exxon Mobil, propriétaire de la marque Esso, a longtemps caché au public qu’elle connaissait le lien de causalité entre la production de pétrole et la crise climatique. 

Pendant des décennies, le géant pétrolier a mis en doute publiquement la réalité du réchauffement climatique et a nié l’exactitude des modèles climatiques des scientifiques. Pourtant, différentes enquêtes, dont celle publiée dans Science, montrent qu’Exxon disposait, dès les années 1980, de travaux scientifiques à l’interne lui permettant de prédire avec précision les changements climatiques.

«Exxon, c’est connu internationalement, ils avaient des informations cachées depuis les années 70», mais «on veut que le gouvernement poursuive les différentes compagnies, pas seulement pour avoir caché de l’information», mais pour «les méfaits, c’est-à-dire les impacts des changements climatiques», c’est ce que font «la Californie, le Massachusetts et le Rhode Island», a expliqué la députée Zaga Mendez.  

«L’adaptation au changement climatique, ça va coûter tellement d’argent. Où est-ce qu’on va chercher l’argent? Dans les poches des Québécois ou dans celles des compagnies qui ont menti et qui sont responsables de ses effets?», a demandé la responsable solidaire en matière d’environnement.


L’exemple du tabac

Questionnée à savoir quelle était la part de responsabilité du citoyen qui fait le choix de consommer des combustibles fossiles pour se déplacer, même si ceux-ci sont responsables de la crise climatique, la députée Ruba Ghazal a fait un parallèle avec l’industrie du tabac.

«Le gouvernement n’a pas décidé d’aller poursuivre tous les fumeurs parce que fumer n’est pas bon pour leur santé et que ça coûte de l’argent. On a décidé au Québec, collectivement, qu’on a un système de santé pour tout le monde, peu importe ce que les gens ont fait dans leur vie» et «les responsables (de la crise climatique), ce ne sont pas les gens qui, des fois, n’ont pas d’autres choix que d’utiliser leur voiture ou leur camion, ce sont les entreprises qui ont mis ces produits sur le marché et qui après ça, ont menti», a résumé la députée Ghazal.

«Dans le cas du tabac, ce n’est pas un argument qui a été retenu, en tout cas pas de manière suffisante pour les exonérer, alors on a un parallèle important», a ajouté Guillaume Cliche-Rivard, responsable solidaire en matière de justice.

Québec solidaire demande que le gouvernement du Québec s’inspire de la récente défaite des fabricants de cigarettes devant les tribunaux pour mettre au pas les pétrolières.

Après s’être défendus bec et ongles durant 25 ans devant les tribunaux, les géants canadiens du tabac devront finalement débourser 32,5 milliards de dollars (G$) aux victimes canadiennes du tabagisme et aux provinces pour les coûts de santé entraînés par leurs produits, selon ce qu’a statué un juge de l’Ontario le mois dernier.

«Comme les pétrolières, l’industrie du tabac savait que la cigarette était nocive pour la santé, mais l’a caché à la population. Résultat: les compagnies de tabac devront payer 6G$ au Québec. Qu’est-ce qu’on attend pour faire la même chose avec les grands pollueurs?», a conclu le député Guillaume Cliche-Rivard.

La Presse Canadienne a sollicité l’avis des principaux partis politiques à l’Assemblée nationale du Québec sur la demande de Québec solidaire.

En fin d’après-midi mercredi, seul le Parti québécois (PQ) avait répondu.

«On ne commentera pas», a écrit un attaché de presse du PQ.

Par Stéphane Blais