L’Inflation Reduction Act (IRA) est une législation phare de l’administration démocrate de Joe Biden. (Photo: Getty Images)
Même si elle représente des occasions d’affaires pour le Québec, l’Inflation Reduction Act (IRA) – une législation phare de l’administration de Joe Biden – comporte surtout des risques pour la demande industrielle en électricité au Québec et la filière naissante des batteries dans la province.
Voilà la principale conclusion d’une étude conjointe que publient ce jeudi l’Institut du Québec (IDQ) et l’Alliance Switch, une organisation québécoise qui réunit des représentants de groupes environnementaux, du milieu des affaires et de la finance.
Luc Belzile, économiste principal à l’IDQ, a réalisé ce rapport avec la collaboration d’Emna Braham, directrice générale de cet organisme.
Intitulée La Loi sur la réduction de l’inflation aux États-Unis, cette étude analyse les impacts que pourrait avoir cette loi, entre autres sur le marché des énergies renouvelables, le secteur des minéraux critiques et stratégiques (MCS) et la filière naissante des batteries pour les véhicules électriques.
Notre électricité moins compétitive qu’aux États-Unis
Par exemple, dans le marché des énergies renouvelables, le gouvernement américain aide massivement son industrie pour développer davantage la production d’énergie solaire et éolienne.
Selon l’étude, l’offre d’énergie verte aux États-Unis pourrait bondir de 40% au cours de la prochaine décennie, en plus de faire probablement diminuer le prix de l’électricité sur le marché américain.
Or, pendant ce temps, le coût d’approvisionnement en électricité devrait plutôt s’accroître au Québec, comme l’indique Hydro-Québec dans son plan stratégique 2022-2026.
Aux États-Unis, l’IRA pourrait contribuer à faire baisser les prix de l’électricité au détail de 5,2 à 6,7% d’ici 2032, comme on peut le constater sur ce graphique.
Les prix de l’électricité au détail aux États-Unis pourraient dominuer de 5,2 à 6,7% d’ici 2032. (Graphique: IDE, Alliance Switch)
Si ces ordres de grandeur peuvent «paraître modestes lorsqu’on les envisage sur une décennie», il ne faut toutefois pas les sous-estimer, soulignent les auteurs de l’étude.
«Dans la perspective où le coût de l’électricité produite au Québec serait appelé à croître plutôt qu’à diminuer, selon les projections d’Hydro-Québec, les baisses de coût des énergies éolienne et solaire prennent une tout autre dimension. La vigilance est donc de mise concernant la capacité concurrentielle de l’électricité du Québec.»
Les batteries dans collimateur des Américains
La filière naissante des batteries au Québec pourrait aussi pâtir de l’IRA, selon l’IDQ et l’Alliance Switch.
L’enjeu est de taille, alors que le gouvernement de François Legault essaie d’attirer dans la province un producteur de cellules de batterie, et ce, afin de compléter l’écosystème de cette nouvelle grappe industrielle dans la région de Bécancour.
«À l’heure actuelle, le Québec agit à toutes les étapes sauf à celle de la production, puisqu’il n’y a pas encore d’entreprise qui a annoncé sa venue pour la production de cellules de batterie. L’avènement de l’IRA compromet les perspectives concernant les étapes de production de batteries et de fabrication de véhicules électriques», affirment les auteurs de l’étude.
Même si elle représente des occasions d’affaires pour le Québec, l’Inflation Reduction Act (IRA) – une législation phare de l’administration de Joe Biden – comporte surtout des risques pour la demande industrielle en électricité au Québec et la filière naissante des batteries dans la province.
Il faut dire que les États américains et le gouvernement fédéral sont très agressifs pour convaincre les constructeurs automobiles américains et étrangers d’installer leurs usines de batteries aux États-Unis.
Dans certains cas, les crédits d’impôt peuvent s’accumuler et atteindre 45 $ US/kWh, «ce qui représenterait le tiers du coût de production de la batterie produite aux États-Unis actuellement», souligne l’étude.
Les auteurs précisent que cette mesure s’applique pour chaque véhicule produit, chaque année, jusqu’en 2032.
Des occasions d’affaires pour les minéraux critiques
Par ailleurs, l’Inflation Reduction Act représente aussi des occasions d’affaires pour des entreprises québécoises aux États-Unis, à commencer par le secteur des minéraux critiques et stratégiques (MCS), selon l’IDQ et l’Alliance Switch.
«Comme la demande pour de tels minéraux est déjà en forte hausse, il s’agit d’une véritable occasion d’affaires pour le Québec», affirme Denis Leclerc, président et chef de la direction d’Écotech Québec et membre de l’Alliance Switch.
À ses yeux, pour en tirer profit pleinement, le Québec devra mettre en valeur ses minéraux en les transformant en produits à forte valeur ajoutée, tout en s’assurant de respecter les normes environnementales et d’obtenir l’acceptabilité sociale des projets d’extraction et de transformation.
Cela dit, l’étude ne s’est pas penchée sur la façon de stimuler davantage la deuxième et la troisième transformation de MCS au Québec.