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La plateforme de location de logements entre particuliers Airbnb a lancé mercredi officiellement son processus d’entrée en Bourse, après des mois de rumeurs et d’incertitude pour la société durement touchée par la pandémie qui était attendue à Wall Street depuis l’année dernière.
Airbnb a déposé mercredi un dossier confidentiel auprès du gendarme de la Bourse américaine, la SEC, le début d’un longue procédure d’intronisation.
Le groupe californien n’a pas divulgué d’informations financières ni précisé combien de titres seraient mis sur le marché.
Il avait officiellement fait part en septembre dernier de son intention d’entrer en Bourse courant 2020. Mais il avait dû mettre ses projets en suspens en raison de la pandémie de COVID-19, qui a dévasté le secteur du tourisme et des voyages au printemps.
«Nous traversons collectivement la crise la plus douloureuse de notre vie», avait déclaré en mai Brian Chesky, cofondateur de l’entreprise, quand il a dû annoncer le licenciement d’environ 25% de ses 7 500 employés dans le monde.
Airbnb avait alors admis qu’elle afficherait en 2020 un chiffre d’affaires «de moins de la moitié» de celui de 2019.
En avril, en plein marasme à cause des nombreuses annulations et de la crise du tourisme liée à la crise sanitaire, la société de San Francisco avait levé 1 milliard de dollars auprès de fonds d’investissement.
Elle valait alors 18 milliards de dollars, selon la chaîne économique américaine CNBC, bien en-deçà des 35 milliards estimés avant la pandémie.
En juin, Airbnb a repris espoir grâce à la reprise des séjours courts et à proximité de chez soi. «Nos données montrent que le secteur commence à rebondir», avait assuré la plateforme.
Plus des licornes
Cette annonce intervient le jour où Apple dépasse les 2 000 milliards de dollars de valorisation boursière, signe de la vitalité des groupes de la Silicon Valley malgré la récession.
Elle marque aussi l’entrée «dans la cour des grands» d’une autre entreprise relevant de la «gig economy», ou économie du partage, née au tournant des années 2010 et qui a révolutionné plusieurs secteurs d’activité dans le monde.
Airbnb a opté pour une procédure dite «confidentielle», permise depuis 2012 par une loi américaine et élargie en 2017 aux grosses entreprises par la SEC.
Elle vise à favoriser les introductions en Bourse sans avoir à révéler publiquement certaines informations financières, du moins pas avant un stade avancé.
Elle permet aussi de s’exposer plus en douceur aux marchés, qui se sont avérés redoutables pour d’autres licornes (entreprises non cotées valorisées à plus d’un milliard) de l’économie à la tâche.
Uber, par exemple, a peiné à séduire les investisseurs au printemps 2019. Côté WeWork, l’opération lancée à l’automne s’est soldée par un fiasco. Le géant américain de la location de bureaux partagés a dû reporter son introduction au Nasdaq et son patron Adam Neumann a été évincé.
Matelas gonflables
Airbnb a été fondée par Brian Chesky et Joe Gebbia, qui ont commencé par louer des matelas gonflables dans leur appartement le temps d’un congrès à San Francisco, fin 2007.
Il leur faut ensuite près de deux ans pour créer la plateforme sous son nom actuel et récolter, après avoir essuyé de nombreux refus, 600 000 dollars auprès d’un fonds d’investissement.
En 2011 leur entreprise, qui revendique une présence dans 89 pays et plus d’un million de réservations de nuitées, entre dans le club des licornes.
Elle a depuis connu une croissance spectaculaire malgré les nombreux obstacles.
Airbnb fait notamment face à une fronde des municipalités (Paris, Berlin, Barcelone…) et des hôteliers, qui s’inquiètent de voir des logements privés se transformer de facto en hôtels, privant les habitants de logements, favorisant la spéculation immobilière et créant un manque à gagner pour le secteur hôtelier traditionnel.
Et surtout, plus récemment, la pandémie a fait douter de la viabilité du modèle du groupe.
Mais selon Arun Sundararajan, professeur à la New York University et chercheur sur l’économie du partage, l’avenir pourrait ne pas être si sombre pour la plateforme, qui a su construire une relation de confiance avec ses utilisateurs. Elle a notamment instauré de nouvelles règles sanitaires.
«Au fur et à mesure que les gens reprendront les voyages, ils s’orienteront vers des espaces sur lesquels ils sentiront qu’ils ont un contrôle», disait-il à l’AFP en mai dernier.
«Ils ne voudront pas traverser de réceptions d’hôtel bondées.»