Longtemps considéré comme un modèle de réussite pour les entreprises chinoises, Alibaba a été le premier à subir la vindicte des autorités chinoises. (Photo: 123RF)
Hong Kong — Le géant du commerce en ligne chinois Alibaba a annoncé mardi qu’il allait faire de Hong Kong son autre marché principal de cotation, au même titre que Wall Street où il est déjà présent depuis 2014, dans le but d’avoir un meilleur accès aux investisseurs de Chine continentale.
Le groupe Alibaba est déjà inscrit à Hong Kong depuis 2019. Mais il ne s’agit pour le moment que d’une cotation secondaire, ne lui permettant pas de participer au lucratif programme Stock Connect qui lie les Bourses de Hong Kong à celles de Shanghai et Shenzhen.
Cette décision, qui entrera en vigueur d’ici la fin de l’année, intervient par ailleurs alors que les entreprises technologiques chinoises cotées à New York s’inquiètent de plus en plus d’un renforcement de la réglementation par les autorités américaines, dans un contexte de tensions croissantes entre Pékin et Washington.
Pékin s’est opposé à une tentative des régulateurs américains d’inspecter les documents des entreprises chinoises cotées aux États-Unis. Alibaba fait partie des 250 entreprises qui risquent d’être radiées de la cote à New York si aucun accord n’est conclu.
Bond du titre Alibaba
L’annonce a fait bondir l’action Alibaba à Hong Kong. Le titre a terminé la séance de mardi en hausse de 4,82% à 104 dollars de Hong Kong.
Le groupe basé à Hangzhou, dans l’est de la Chine, est l’un des nombreux mastodontes de la technologie pris au piège d’une vaste répression de pratiques anticoncurrentielles présumées depuis fin 2020 en Chine.
Cette campagne visant à contrôler les grandes entreprises technologiques est motivée par la crainte qu’elles ne se soient développées trop rapidement, et par des accusations de collecte abusive des données personnelles des utilisateurs.
Longtemps considérée comme un modèle de réussite pour les entreprises chinoises, Alibaba, fondée par le fantasque Jack Ma, avait été la première à subir la vindicte des autorités. Elle avait écopé d’une amende de 2,3 milliards d’euros l’an dernier.
Mais alors que l’économie chinoise ralentit, les autorités semblent adopter une attitude plus souple. En mai, le premier ministre Li Keqiang a exhorté les entreprises technologiques à s’introduire en Bourse, tant en Chine qu’à l’étranger.
Base d’investisseurs plus large
La décision de faire de Hong Kong un autre marché principal de cotation vise à favoriser «une base d’investisseurs plus large et plus diversifiée pour partager la croissance et l’avenir d’Alibaba, notamment en provenance de Chine et d’autres marchés d’Asie», a déclaré mardi le PDG du groupe, Daniel Zhang.
«Hong Kong est également la rampe de lancement de la stratégie de mondialisation d’Alibaba, et nous avons pleinement confiance en l’économie et l’avenir de la Chine», a-t-il ajouté.
Le programme Stock Connect de Hong Kong permet aux entreprises de tirer parti des liquidités de la Chine continentale pour obtenir un financement plus facile et des valorisations plus élevées. Mais pour en bénéficier, elles doivent réaliser la majorité de leurs transactions annuelles à Hong Kong.
Alibaba subit encore le contrecoup du tour de vis de Pékin dans le secteur des technologies, et du ralentissement de l’économie chinoise causé par les restrictions anti-COVID draconiennes. En 2021, son bénéfice net a chuté de 59%.
Alibaba a par ailleurs annoncé mardi que tous les représentants de sa filiale de paiement numérique Ant Group avaient été retirés d’un organe de direction commun.
Sept dirigeants d’Ant Group, dont le PDG Eric Jing et le directeur de la technologie Ni Xingjun, ont quitté le 31 mai Alibaba Partnership, une entité qui peut nommer la majorité des membres du conseil d’administration d’Alibaba, selon un rapport annuel publié mardi.
Selon un porte-parole d’Ant Group, cette mesure s’inscrit dans le cadre du long processus de restructuration exigé par le gouvernement chinois pour «améliorer la gouvernance de l’entreprise».
En 2020, les régulateurs chinois avaient fait capoter à la dernière minute une gigantesque introduction en Bourse d’Ant Group à 34 milliards de dollars américains à Hong Kong.
Ant Group a mis fin à son accord de partage de données avec Alibaba et a récemment remanié son conseil d’administration, dont la moitié des sièges sont désormais occupés par des administrateurs indépendants. Le nombre d’administrateurs non exécutifs provenant d’Alibaba est dans le même temps passé de trois à deux.