Ce que les conseillers devraient savoir sur les cryptomonnaies
Morningstar|Publié le 12 septembre 2022Les autorités ont commencé à réagir aux risques qui entourent les cryptomonnaies. (Photo: 123RF)
L’intérêt que les clients portent aux cryptomonnaies ne va pas disparaître de sitôt, et les autorités le reconnaissent et sont en train d’élaborer des cadres de référence réglementaires dans cet espace. Au Canada, nous avons vu émerger des règles régissant les échanges, et plus récemment, des exemptions pour les négociateurs.
La prochaine chose qu’on pourrait voir, ce sont des règles spécifiques à l’intention des conseillers canadiens. Entre-temps, nous pouvons essayer de voir d’où souffle le vent et établir certaines lignes directrices. Aux États-Unis, Jasmin Sethi de Morningstar a trouvé que des développements récents fournissaient certaines indications en l’absence de règlements officiels: «Je les appelle des “accroches”: des instructions et des précédents qui, bien qu’ils n’aient pas été érigés en lois, peuvent indiquer que les conseillers seront sous l’étroite surveillance des autorités.»
Au Canada, voici comment ça se présente:
– Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM): les risques des cryptomonnaies
– Revenu Canada: guide de la monnaie virtuelle pour les utilisateurs de cryptomonnaie et les professionnels de l’impôt
– CSA — Guidance on the application of existing securities legislation cation of existing securities legislation
– CSA/IIROC — Framework for compliance for trading platforms
– IIROC — Exemptions related to insurance and custody requirements
– IIROC — Guidance for crypto trading platform re: advertising
– OSC — Enforcement action against crypto trading platforms
– CSI — Investir dans le bitcoin: possibilités et risques (mini-cours)
Les cryptomonnaies pour les conseillers: les risques
Avant d’appeler l’attention des autorités, il convient de considérer les risques que cache la notoriété des actifs en cryptomonnaies.
«Les cryptomonnaies sont excessivement spéculatives et sujettes à une extrême volatilité, dit Mme Sethi, elles sont particulièrement hasardeuses pour les participants à l’approche de la retraite ou ceux qui choisissent d’y affecter une grosse portion de leurs comptes.»
Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) identifient quatre dangers principaux:
1. La volatilité: le battage des médias sociaux et les campagnes de marketing peuvent créer d’énormes fluctuations dans les cryptomonnaies, et il n’y a habituellement que peu de restrictions pour les transactions.
2. La liquidité: il est en fait fort possible que les plateformes de transactions de cryptomonnaies n’aient pas suffisamment de fonds pour couvrir votre ordre de transaction. «Il n’y a pas non plus de garantie que la demande d’un actif en cryptomonnaie donné va continuer», dit le mémoire des ACVM.
3. Le risque en ligne: les cryptomonnaies peuvent être partout et avoir des interactions avec n’importe quels intermédiaires. C’est fantastique au niveau de l’innovation, mais un casse-tête pour les questions de dépositaire. Prenons par exemple le prêteur Celsius, qui a imposé une «pause» aux retraits des investisseurs. James Gard de Morningstar a récemment trouvé que les arrangements relatifs au dépositaire de la société avaient donné à cette même société la propriété des actifs, à utiliser «comme elle l’entend».
4. Les risques techniques et liés à la cybersécurité: nous avons entendu parler des piratages, mais les cryptomonnaies offrent aussi un terrain propice aux vulnérabilités de programmation. Même les monnaies conçues dans un souci de stabilité s’effondrent au moment d’un sauve-qui-peut généralisé.
Que devraient savoir les conseillers sur l’imposition des cryptomonnaies?
Les autorités ont commencé à réagir aux risques qui entourent les cryptomonnaies, à commencer par Revenu Canada dont les consignes précisent que toutes les transactions mettant en jeu des cryptomonnaies étaient généralement traitées comme des revenus d’entreprise ou des gains en capital.
Pour les investisseurs, selon l’ARC, acheter une cryptomonnaie dans l’intention de la vendre à profit peut provoquer un traitement de revenu d’entreprise même si c’est un incident isolé, parce que cela pourrait être considéré comme une affaire risquée ou de caractère commercial.
Un conseiller agissant au nom d’un client pourrait argumenter que ce n’était pas «une affaire risquée», mais il s’emploiera à ce que ce ne soit pas une extension des affaires de son client. Détenir un portefeuille crypto ouvre la porte des dépôts à quiconque est titulaire de cette adresse, et les transactions sont permanentes.
Une autre chose dont il faut se méfier est la manière dont la législation fiscale canadienne s’applique aux alt-coins. Souvent, pour acheter des alt-coins, le papier-monnaie doit être converti à des cryptomonnaies communes comme le bitcoin ou l’ethereum. Cette transaction d’une crypto à l’autre déclenche des règles selon lesquelles les déclarations de transactions comportent des étapes supplémentaires.
Généralement, quand on se débarrasse d’une cryptomonnaie pour en acquérir une autre, ce sont les règles du troc qui s’appliquent, indique le mémoire de l’ARC. Il faut convertir la valeur de la cryptomonnaie que l’on a reçue en dollars canadiens. Cette transaction est considérée comme une liquidation, et il faut l’inscrire sur sa déclaration d’impôt. On déclare le gain ou la perte qui en résulte soit comme un revenu (ou une perte) d’entreprise, soit comme un gain (ou une perte) en capital.
Une bonne alternative à la complexité de «détenir» des cryptomonnaies est simplement d’acheter un fonds, bien sûr. Moyennant des frais, acquérir un intérêt dans des cryptomonnaies est aussi facile qu’acheter un FNB. Un autre avantage est que le traitement fiscal en sera bien plus familier.
Aider les clients à comprendre les règles
Pour ce qui est des règlements officiels sur les transactions en cryptomonnaies, commencez par examiner la législation existante, comme l’ont fait les ACVM en 2019: «si les actifs en crypto, que ce soient des titres ou des produits dérivés, sont négociés sur une plateforme, celle-ci sera sujette à la législation régissant les valeurs mobilières», avec en 2020 la clarification suivante: «dans certains cas, l’actif crypto est clairement un titre, par exemple un titre tokenisé qui s’accompagne des droits traditionnellement attachés aux actions ordinaires comme le droit de vote et celui de distribuer des dividendes. Dans d’autres cas, l’actif crypto est un produit dérivé, par exemple un jeton qui donne la possibilité d’acquérir un actif dans l’avenir.»
Les plateformes de transactions en cryptomonnaies semblent être jusqu’à présent la cible principale des autorités de réglementation, et bien que ces dernières ne traitent pas spécifiquement des activités des conseillers, cela nous donne une idée claire de ce que couvre la législation sur les valeurs mobilières, et c’est «un droit ou une prétention contractuelle à un actif crypto sous-jacent».
Les ACVM et l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM) ont depuis lors défini un cadre réglementaire propre aux plateformes d’échange des actifs en cryptomonnaies. Il est désormais fait obligation à ces plateformes d’être enregistrées, et on dirait bien pour le moment que les organismes de réglementation provinciaux prennent cela au sérieux.
Abordant les problèmes de dépositaires propres aux cryptomonnaies, l’OCRCVM a accordé des exemptions aux règles régissant les négociateurs, qui ont mis Fidelity en première place pour offrir des transactions et des services de dépositaire crypto aux clients institutionnels.
L’OCRCVM a aussi produit des consignes sur la publicité et les médias sociaux liés aux cryptomonnaies, en signalant des activités qui pourraient faire l’objet d’un examen, par exemple la publication de déclarations qui pouvaient être considérées fausses ou trompeuses. D’autres comportements mentionnés qui sont assurés de déclencher la sonnette d’alarme sont l’utilisation de compétitions assimilables à des paris ou des promotions qui entraînent un bonus.
Ces soucis exprimés par les autorités peuvent aider les conseillers à prendre conscience des environnements dans lesquels se trouvent les clients quand ils réclament des consignes.
Rappelez-vous votre rôle de conseiller
«Les cryptomonnaies sont une occasion alléchante pour ceux qui essaient de s’enrichir rapidement. Ils entendent des histoires sur des gens qui gagnaient de grosses sommes d’argent et espèrent reproduire ce succès, sans beaucoup de connaissance des risques que cela implique, dit Mme Sethi. Outre le simple attrait des cryptomonnaies, les clients ont aussi moins de chances d’en savoir suffisamment sur ces placements que sur les catégories d’actifs traditionnelles. Évaluer les placements en cryptomonnaies est difficile, même pour les investisseurs aguerris. Les conseillers doivent prendre le temps de s’assurer que leurs clients sont pleinement informés de cet actif et des risques qu’il comporte au lieu de leur permettre de les accepter naïvement.»
Donner des conseils sur les cryptomonnaies n’est pas chose facile. Il y a tout un monde d’influences et de facteurs techniques à considérer, qui doivent être compatibles avec les objectifs du client.
«Il est important pour les conseillers d’examiner les circonstances et les risques propres à chaque client ainsi que son degré d’opulence pour déterminer les bonnes affectations et se convaincre qu’ils ont une compréhension totale des risques que comporte cette catégorie d’actifs, dit Mme Sethi. Cela dit, les cryptomonnaies peuvent présenter un intérêt et une utilité pour les clients qui veulent affecter une petite portion de leur portefeuille au niveau approprié», et les conseillers ont un rôle essentiel à jouer pour aider les clients à prendre les bonnes décisions en matière de répartition d’actifs, et à déterminer le meilleur moyen d’investir.
Avant d’essayer de répondre à une question posée par un client, songez à vous abonner à Cryptocurrency News and Discussions ou à améliorer votre compréhension des opportunités et des risques qui entourent cette catégorie d’actifs en pleine évolution.