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La technologie va-t-elle trop vite pour l’humanité ? Explosion des données en circulation, emplois menacés par les robots, fiscalité incertaine et intelligence artificielle menaçante ont occupé les esprits toute la semaine à Davos.
Preuve de cette forte préoccupation, 75 pays ont eu recours à Davos au multilatéralisme et à l’Organisation mondiale du commerce (OMC), pourtant mal en point depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche, et promis d’engager des discussions afin de réguler de manière « plus efficace le commerce en ligne ».
À cette occasion, les États-Unis et la Chine ont enterré un instant la hache de guerre pour se joindre à ce groupe, même si Pékin ne s’est engagé qu’en dernière minute vendredi matin, a indiqué le directeur général de l’OMC, Roberto Azevêdo, lors d’une conférence de presse.
Le discours le plus alarmiste a certainement été tenu jeudi soir par le milliardaire et philanthrope George Soros, lors du dîner qu’il donne traditionnellement en marge du Forum économique mondial.
« Je veux attirer l’attention sur le danger mortel que font courir aux sociétés ouvertes les instruments de contrôle que le “machine learning” et l’intelligence artificielle mettent dans les mains de régimes répressifs », a-t-il dit, en visant particulièrement la Chine.
Autre préoccupation : la menace que fait peser sur les emplois la robotisation, dans un monde où les inégalités se creusent et où la peur du déclassement alimente le populisme.
« Toutes ces entreprises tech et non tech ont une très grande responsabilité », a dit Jean-Philippe Courtois, vice-président exécutif de Microsoft, à l’AFP.
Les fruits de l’économie numérique doivent être redistribués « à une plus grande masse de personnes », selon lui, ce qui implique de faire des efforts « dans l’éducation ».
Les entreprises « sous-estiment l’accélération du rythme de la numérisation, les changements de comportement et de technologie qui dictent ce rythme et, surtout, l’ampleur de la +disruption+ qui les attend », a noté la société de conseil McKinsey dans une récente étude.
Pour prendre l’exemple du secteur financier, « il a été conçu pour servir des gens qui travaillent de 9H00 à 17H00, pour un seul employeur, souvent pendant toute leur carrière », constate Bill Ready, directeur opérationnel de la société de paiement par PayPal.
« Quand la façon de gagner de l’argent change, la manière dont l’argent est versé et géré doit changer aussi », a-t-il dit.
Microsoft, de son côté, a choisi de se tourner vers l’informatique dématérialisée, le « cloud », après avoir constaté que sa vache à lait traditionnelle, le système d’exploitation Windows, perdait du terrain.
Dans un local installé dans la rue principale de Davos, le géant américain montre des vidéos censées représenter les petites révolutions promises par l’intelligence artificielle.
Par exemple le « supermarché du futur », avec des capteurs qui permettent d’alerter immédiatement le service de nettoyage si une brique de lait s’écrase par terre.
Mais les entreprises « doivent être super claires sur ce qu’elles veulent faire », alors que les innovations technologiques suscitent leur lot de tensions, autour des VTC par exemple, ou de l’impact d’Airbnb sur le marché immobilier et hôtelier.
« 4e révolution industrielle »
Cette « quatrième révolution industrielle » va « plus vite que quiconque l’attendait », explique Murat Sonmez, expert du Forum économique modial, l’organisation qui gère la réunion de Davos, mais produit aussi un grand nombre de rapports ou expertises.
« Les entreprises et les gouvernements prennent du retard, et restent coincés en arrière », selon lui.
L’influence des réseaux sociaux sur les processus politiques, la confidentialité des données personnelles, mais aussi la fiscalité des géants de la tech sont autant de défis pour les États.
La numéro deux de Facebook, Sheryl Sandberg, a elle profité de sa venue à Davos pour tâcher de redorer l’image du groupe, ternie par le scandale Cambridge Analytica.
« Nous n’avons pas anticipé tous les risques liés au fait de relier autant de gens entre eux », a-t-elle dit lors d’une rencontre organisée par l’hebdomadaire allemand Die Zeit. « Nous avons besoin de regagner la confiance », a-t-elle ajouté.