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Il faut rester sur ses gardes quand on investit dans les cryptos

François Remy|Publié le 13 février 2023

Il faut rester sur ses gardes quand on investit dans les cryptos

(Illustration: Camille Charbonneau)

LES CLÉS DE LA CRYPTO est une rubrique qui décode patiemment l’univers de la cryptomonnaie et ses secousses boursières, industrielles et médiatiques. François Remy se donne pour mission d’identifier les entrepreneurs prometteurs, de décoder les progrès techniques et d’anticiper les impacts industriel et sociétal de cette monnaie numérique.

Détenir des cryptomonnaies exige de bonnes conditions de stockage et de protection de ses actifs numériques. C’est ce qu’on appelle communément la garde (custody). Différentes solutions existent, toutes assorties de diverses conséquences qu’il est essentiel de connaître.

«Faire des choix conscients concernant la garde des actifs numériques permettra aux investisseurs de mieux protéger leurs actifs, et pourrait être un facteur clé de la participation des investisseurs institutionnels au marché des actifs numériques», soulignent les experts de BlockZero, le cabinet de consultance spécialisé en crypto et blockchain, dans leur rapport La garde des actifs numériques: Un paysage en évolution.

La conservation a toujours constitué une pièce maîtresse de l’infrastructure financière, numérique ou autre. Face à l’embarras du choix offert par l’éventail des solutions de garde, les individus et les organisations se doivent de comprendre pleinement les différentes options. Surtout que s’y ajoutent des conditions multiples, elles-mêmes assorties de critères variables. «Exigences réglementaires de leur région, besoins,… la garde d’actifs numériques s’accompagne d’une variété de choix, chacun ayant ses propres risques, avantages et implications», expose-t-on chez BlockZero.

Il faut dire que les événements qui ont marqué le secteur du bitcoin l’année dernière (FTX & consorts) ont exacerbé toute l’importance de la méthode de conservation et du type de dépositaire. Ces paramètres s’avèrent déterminants pour ce qu’il adviendra des actifs digitaux lorsque le pire des scénarios devient réalité.

«C’est l’une des principales questions à se poser lorsque l’on envisage d’investir dans des actifs numériques, que ce soit l’Ethereum ou le Bitcoin, ou des actifs comme les NFT», insistent les conseillers de BlockZero.

Dans la finance traditionnelle, les banques et autres institutions financières conservent généralement les actifs de leurs clients. Autrement dit, ces acteurs portent la responsabilité de la bonne gestion, mais aussi d’en empêcher le vol ou la perte.

Des conservateurs qualifiés

Dans le monde de la crypto, les investisseurs, qu’ils soient particuliers ou institutionnels, doivent protéger leurs actifs de la même manière qu’ils protègent leurs liquidités, leurs actions et autres titres. Ce type de garde est fourni par des plateformes d’échange de cryptomonnaies, des dépositaires dédiés, des portefeuilles numériques (wallets) en libre-service et des portefeuilles tiers.

«Alors que les clients de détail peuvent choisir leur méthode préférée de garde, dans une certaine mesure, dans certaines juridictions comme le Canada, les investisseurs institutionnels sont tenus de conserver leurs actifs auprès de tiers réglementés afin de garantir la conformité avec les réglementations existantes et pour une gestion efficace des risques», nuance le rapport de BlockZero.

Au cœur de la conservation des actifs numériques se trouve le concept de wallet, l’endroit où sont stockées les clés cryptographiques du détenteur. En fonction du type de sécurité choisie pour les fonds en cryptos, les utilisateurs peuvent choisir deux catégories de services de wallet, à savoir les services sans garde (self-custody) et les services avec garde (custodian).

«En fonction du service de portefeuille choisi, trois méthodes de stockage des clés crypto sont disponibles: hot wallet (portefeuille connecté), warm (connecté, mais avec un niveau de sécurité emprunté au cold) et froid (hors ligne). On peut faire passer les actifs numériques d’un portefeuille dit chaud à un portefeuille froid en fonction des besoins de transaction. Certaines alternatives apportent des couches supplémentaires de sécurité et de fonctionnalités au stockage des cryptomonnaies, comme les portefeuilles à signatures multiples (multisig) et à contrats intelligents (smart contract)», précisent les rapporteurs.

Retard canadien

La popularité et la capitalisation croissantes des actifs numériques ont donné naissance à un certain nombre de solutions de conservation. Ce qui a donné lieu à un paysage dispersé, mouvant et parfois peu sûr.

«Cela nous rappelle les débuts de l’industrie des services financiers et les débuts de la banque moderne au XIXe siècle. L’apparente confusion peut inquiéter les investisseurs institutionnels, car elle est source d’incertitudes. Dans le même temps, après des années d’incrédulité, leur regard sur les actifs numériques s’est transformé en intérêt, alimenté par l’attrait de rendements plus élevés et la valeur sous-jacente des innovations technologiques», épingle BlockZero.

Mais, alors qu’il existe de nombreux dépositaires de qualité institutionnelle aux États-Unis, le Canada en compte seulement quatre: Tetra, Knox, Balance et Brane Capital.

«Bien que le Canada ait été le 1er pays à autoriser les fonds négociés en bourse (FNB) de crypto-actifs, et que cette réglementation exige aux investisseurs institutionnels de conserver leurs titres auprès d’entités réglementées, de préférence au Canada, l’écosystème a pris du retard dans l’offre de solutions de garde qualifiées, de sorte que beaucoup ont choisi l’un des nombreux dépositaires américains», ponctuent les consultants.