Innodal: une innovation québécoise pour se débarrasser de la Listeria
Emmanuel Martinez|Mis à jour le 30 septembre 2024Photo : Les fondateurs d’Innodal, Laurent Dallaire et François Bédard ont reçu le prix innovation 2024 des mains de la gouverneure générale du Canada Mary Simon à Rideau Hall à Ottawa, plus tôt cette année. (Photo: courtoisie)
De tristes événements comme la mort plus tôt cette année de trois Canadiens qui ont bu du lait d’avoine contaminé par la bactérie Listeria pourraient devenir chose du passé grâce à une start-up de Québec.
Innodal, qui a créé une protéine qui tue la bactérie Listeria dans les aliments, a reçu une approbation qui lui ouvre la voie pour commercialiser son produit aux États-Unis. Au mois d’août, la Food and Drug Administration, l’agence américaine chargée de la surveillance des denrées alimentaires et des médicaments, a approuvé l’utilisation d’Inneo, le produit conçu dans les laboratoires de l’entreprise à Québec. Santé Canada avait déjà donné son feu vert en 2000, ce qui avait permis à la jeune pousse de vendre son produit au pays depuis.
«J’en perds me mots, affirme le président et cofondateur d’Innodal, Laurent Dallaire, entrevue. C’est génial. Cela nous permet de commercialiser notre innovation aux États-Unis, mais aussi ailleurs en Amérique.»
Sans traces
L’entreprise a recours à des peptides antimicrobiens naturels qui s’attaquent seulement à la Listeria sans altérer le goût des aliments et qui disparaissent avant que les consommateurs mangent le produit. Elle estime avoir en main une approche complètement nouvelle pour neutraliser des bactéries mortelles qui s’insèrent dans la nourriture lors des étapes de manipulation ou de transformation.
«C’est un produit naturel et biologique, explique le fondateur. L’industrie est prise avec des sels, des sulfites, des nitrites et même du chlore pour des végétaux, donc on offre une solution de rechange qui marque une rupture.»
Les clients d’Innodal sont aussi bien de grandes entreprises qui transforment des produits marins, carnés ou fromagers et qui veulent s’assurer de l’innocuité de leurs aliments qu’ils exportent souvent que des artisans qui désirent ne prendre aucun risque par respect pour la santé de leurs clients ou pour protéger leur réputation. Cette technologie est également utile pour les plats prêts-à-manger.
Le produit est liquide et est dosé pour chaque client selon la quantité d’aliments transformés. Il peut être mélangé à la préparation alimentaire ou être vaporisé sur la surface.
Cet outil de prévention n’est pas considéré comme un ingrédient, donc l’avantage pour les transformateurs, c’est qu’ils n’ont pas besoin de modifier leur étiquetage s’ils l’utilisent.
D’autres bactéries visées
Innodal ne va pas s’arrêter avec la Listeria. Elle compte faire approuver des protéines qui s’attaqueront aux bactéries E. coli et Salmonella. «On fait des demandes simultanées au Canada et aux États-Unis, mentionne Laurent Dallaire. Puisque la nature des protéines sera semblable que celle d’Inneo, on pense que le feu vert sera rapide. On espère que ce soit l’an prochain pour l’E. coli et la suivante pour la Salmonella.»
Ayant grosso modo doublé ses revenus chaque année depuis le début de la commercialisation de son produit en 2020, l’entreprise compte maintenir ce rythme dans les années à venir.
«Je suis fier que notre technologie soit issue de recherches menées ici au Québec», précise Laurent Dallaire. Sa start-up a d’ailleurs mérité le prix du Gouverneur général pour l’innovation 2024 plus tôt cette année pour Inneo.
La plus tristement célèbre éclosion de Listeria au Canada remonte à 2008, lorsqu’une contamination dans une usine torontoise de Maple Leaf avait coûté la vie à 23 Canadiens. Cette éclosion avait également mis en péril les finances de la multinationale, puisqu’elle avait perdu des dizaines de millions de dollars en raison d’un déclin de ses ventes, d’une atteinte à sa réputation et de poursuites judiciaires.