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La reprise du marché boursier canadien peut-elle durer ?

Morningstar|Publié il y a 13 minutes

La reprise du marché boursier canadien peut-elle durer ?

La croissance économique anémique reste préoccupante, même si le Canada a réussi à éviter la récession. (Photo: Dave Chan Getty Images)

Après un deuxième trimestre morose, le marché boursier canadien s’est fortement redressé au cours du troisième trimestre, en partie grâce à une série de baisses de taux de la Banque du Canada. La baisse des taux d’intérêt a contribué à ralentir l’inflation et à soutenir une reprise économique plus large, ce qui a permis au marché d’être plus optimiste pour le reste de l’année et les années suivantes.

Pour les trois mois se terminant le 30 septembre, l’indice Morningstar Canada a enregistré un bon rendement de 11,58%, après un modeste gain de 1,31% au deuxième trimestre. L’indice composite S&P/TSX a enregistré une hausse de 9,3% au cours du trimestre, stimulée par les gains solides des valeurs immobilières, financières et technologiques.  

Qu’est-ce qui a contribué au rebond ?

La réduction de 75 points de base des taux d’intérêt par la Banque du Canada jusqu’à présent en 2024, ainsi que les nouvelles réductions qui sont attendues, ont servi à relancer le marché immobilier, faisant grimper à la fois les titres de l’immobilier et ceux des services financiers. Cette tendance est illustrée par un net rebond de l’indice Morningstar Canada Large-Mid Cap Index (qui comprend les 90% meilleures actions de l’univers investissable canadien en termes de capitalisation boursière), qui a progressé de 12,17% au cours du trimestre. Ce gain a marqué une reprise significative par rapport à la perte de 1,52% enregistrée au trimestre précédent. Le Morningstar Canada Small Cap Index a connu une reprise similaire, avec une hausse de 11,37% après un gain de 1,87% au deuxième trimestre.

Le principal indice boursier canadien a connu son meilleur trimestre depuis quatre ans, avec un rendement de 9,32%. L’un des principaux catalyseurs de la reprise a été le début du cycle de réduction des taux d’intérêt de la Banque du Canada en juin, selon Jimmy Jean, vice-président et économiste en chef chez Desjardins. «La baisse des taux par la Banque du Canada, qui a annoncé d’autres réductions à venir, a été une aubaine pour le secteur immobilier, d’où sa position de chef de file dans la reprise», note-t-il. «Les valeurs financières ont également tiré leur épingle du jeu, car l’allègement des taux contribuera à soutenir la performance du crédit.»

Les bonnes performances des actions canadiennes au troisième trimestre sont également dues à la reprise des marchés mondiaux. Alors que les économies du monde entier montraient des signes de reprise et que le sentiment des investisseurs s’améliorait, les actions canadiennes en ont profité.

«En général, les marchés boursiers mondiaux se sont bien comportés au troisième trimestre, les gains étant dus à des bénéfices solides et à la décision de la Réserve fédérale de réduire les taux d’intérêt dans le contexte d’une économie américaine affaiblie, mais toujours solide», note Jules Boudreau, économiste principal chez Placements Mackenzie. En effet, le marché boursier canadien a été «l’un des marchés les plus performants au niveau mondial au troisième trimestre 2024», après avoir été l’un des moins performants au deuxième trimestre.

Les secteurs à l’avant-garde

Contrastant fortement avec sa sous-performance du deuxième trimestre, le fort rebond de l’indice composé S&P/TSX Index s’est fait sentir dans tous les secteurs, les contributions les plus importantes provenant des services financiers, de la technologie et de l’immobilier. «Nous n’avions pas vu cela depuis le premier trimestre 2019», déclare M. Boudreau.

Notamment, les valeurs technologiques canadiennes ont surpassé leurs homologues américaines et mondiales au cours du trimestre.

« Les titres technologiques ont été l’un des pires secteurs aux États-Unis, avec un gain minime, mais le sous-indice des technologies de l’information TSX a connu un excellent trimestre, grâce à la solide performance de Shopify et de Constellation Software », déclare M. Boudreau.

L’indice S&P/TSX des technologies de l’information a augmenté de 14,1 % au cours du trimestre. Le poids important des valeurs financières dans l’indice TSX a tendance à avoir un effet considérable sur la performance de l’indice. Les valeurs financières se sont bien comportées sur la plupart des marchés boursiers à l’échelle mondiale, « mais comme elles représentent une part importante de l’indice canadien, l’effet a été amplifié », ajoute-t-il.

En outre, l’accélération du rythme des baisses de taux de la Banque du Canada a grandement aidé le secteur immobilier. L’attente généralisée de nouvelles baisses de taux a créé un fort effet de levier pour le secteur, « d’où sa position de chef de file dans la reprise », note M. Jean. L’allègement des taux soutiendra la performance du crédit et donnera aux banques un répit bien nécessaire face à la menace imminente de la falaise de renouvellement des prêts hypothécaires.

Si tout se passe bien et si la Banque du Canada continue de réduire ses taux comme prévu, le reste de l’année pourrait voir les secteurs immobilier et financier continuer à prospérer, car la baisse des taux hypothécaires contribue à réduire les coûts d’emprunt, à alléger la pression sur les ménages canadiens et à stimuler la demande de logements.

Il convient de noter que le TSX a fait preuve de vigueur malgré le fait que son sous-indice de l’énergie ait à peine enregistré des gains au cours du trimestre. L’indice composé S&P/TSX de l’énergie (secteur) a augmenté de 0,95 %. « La situation aurait pu être bien pire pour le secteur, compte tenu de la chute des prix du pétrole », déclare M. Jean, qui ajoute que « l’oléoduc Trans Mountain (TMX) a apporté un certain soutien au secteur ».

En outre, les tensions géopolitiques croissantes ont soutenu les prix du pétrole et les ont empêchés de chuter davantage, ce qui a profité au secteur de l’énergie. L’élargissement et l’intensification du conflit armé au Moyen-Orient pourraient entraîner une hausse des prix du pétrole et stimuler les bénéfices et les performances du secteur de l’énergie au quatrième trimestre.

Dans quelle mesure la Banque du Canada réduira-t-elle ses taux ?

Les données économiques clés, y compris des taux d’inflation plus bas, un marché du travail plus faible et un ralentissement de la croissance économique — continuent d’étayer les arguments en faveur d’une baisse des taux d’intérêt. Le marché canadien évalue à 25 % la probabilité d’une réduction de 50 points de base du taux d’intérêt en octobre. Toutefois, certains experts estiment que les chances d’une baisse des taux d’une telle ampleur sont supérieures à 50 %.

« L’économie canadienne a montré très peu de signes d’inflexion à la hausse», déclare M. Boudreau. Alors qu’un bon rapport sur l’emploi en septembre aux États-Unis pourrait faire réfléchir la Réserve fédérale avant de réduire les taux de manière plus agressive, «nous n’avons pas du tout vu ce genre de retournement au Canada », ajoute-t-il.

La croissance économique anémique reste préoccupante, même si le Canada a réussi à éviter la récession. La croissance au troisième trimestre a probablement été bien inférieure à ce que la Banque du Canada prévoyait en juillet. Par conséquent, «je pense que la Banque du Canada annoncera une réduction de 50 points de base de son taux d’intérêt.

« Le marché de l’emploi canadien s’est sensiblement assoupli et l’inflation globale est revenue à l’objectif de 2 %, bien que les coûts du logement restent élevés. Les arguments en faveur du maintien d’une politique monétaire très restrictive ont donc diminué, et la Banque du Canada a déjà ouvert la porte à une accélération du retour à un cadre neutre », indique M. Jean.

Perspectives pour le quatrième trimestre

Les analystes s’attendent à ce que le Canada ait un rendement inférieur à celui des États-Unis et d’autres marchés internationaux, mais il pourrait tout de même voir un rendement positif. « La vigueur de l’économie américaine et la stabilisation de la Chine devraient maintenir les marchés mondiaux à flot, y compris le Canada », affirme M. Boudreau.

Le marché canadien a également bénéficié en partie de valorisations attrayantes par rapport aux actions américaines. Jean estime que cet avantage persistera jusqu’en 2025, mais s’attend à ce que le quatrième trimestre soit volatil. « L’élection reste un match nul, et une victoire de Trump aurait des conséquences économiques négatives pour le Canada, ce qui pourrait peser sur les actions canadiennes », dit-il.

Or prévoit que l’environnement géopolitique actuel favorise l’énergie et les matériaux, bien que certaines matières premières, comme l’or, soient susceptibles d’être corrigées par rapport aux niveaux élevés actuels. « Dans l’ensemble, il pourrait être difficile de répéter les bonnes performances du troisième trimestre, même si notre scénario de base reste largement constructif à plus long terme », ajoute-t-il.

Selon M. Boudreau, les matériaux pourraient peser sur le marché canadien au quatrième trimestre. Le secteur est surpondéré au Canada, ce qui « pourrait l’amener à sous-performer les autres marchés mondiaux, les gains récents des prix des métaux étant un peu exagérés à notre avis », dit-il.

En outre, les sociétés financières canadiennes sont évaluées presque à la perfection. « Toute nouvelle détérioration de l’économie canadienne pourrait leur faire perdre leurs récents gains ».