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Le bitcoin s’envole, l’endettement des ménages aussi

François Remy|Publié à 14h42 | Mis à jour à 14h48

Le bitcoin s’envole, l’endettement des ménages aussi

Quel le profil d’endettement des ménages qui ont placé de l’argent dans les cryptos? (Photo: 123RF)

LES CLÉS DE LA CRYPTO. Parallèle insoupçonné de la croissance du marché du bitcoin, les consommateurs affichant de faibles revenus mais une forte exposition aux actifs crypto ont nettement augmenté leurs crédits et emprunts.

Au pays des «subprimes», la prévention des chocs économiques vise désormais large pour identifier les vulnérabilités du système financier et autres risques émergents. L’Office of Financial Research (OFR), l’agence créée par le gouvernement américain en réaction à la crise de 2008, s’est ainsi penché sur un angle mort de l’analyse de données: le profil d’endettement des ménages qui ont placé de l’argent dans les cryptomonnaies.

Comment ne pas vouloir chercher les impacts insoupçonnés d’un marché financier des actifs numériques dont la capitalisation est passée en dix petites années de 10 milliards de dollars américains à plus de 3200 milliards actuellement. Forcément, face à pareille croissance, l’attention des investisseurs particuliers a été attirée. Un phénomène dont s’inquiètent des décideurs politiques et régulateurs en raison «de l’extrême volatilité des prix, de l’utilisation extensive de l’effet de levier et du manque de recours juridiques ou de protections des consommateurs», rappellent les auteurs de l’analyse.

La littérature économique avait dernièrement souligné que les investisseurs crypto ressemblaient à la population générale et que ces derniers avaient augmenté leurs dépenses discrétionnaires et acquisitions immobilières grâce aux gains sur cession de cryptomonnaies. Mais on savait encore peu de choses sur la manière dont les marchés du bitcoin affectent le profil d’endettement des ménages et leurs taux de défaillance.

Des emprunts hypothécaires plus élevés

En utilisant les données disponibles de l’IRS (Internal Revenue Service), l’administration fiscale américaine, sur les ménages mentionnant des cryptoactifs dans leurs déclarations d’impôts annuelles, les auteurs montrent que «l’exposition aux cryptomonnaies a presque triplé entre 2020 et 2021».

Autre parallèle interpellant, «l’augmentation de l’endettement est particulièrement frappante parmi les ménages à faibles revenus fortement exposés aux cryptomonnaies», met en évidence la recherche. La part des consommateurs ayant des hypothèques a augmenté de plus de 250% et les soldes hypothécaires moyens ont augmenté de plus de 150% ces quatre dernières années.

Détail de taille, l’ampleur de l’augmentation de l’endettement a été particulièrement importante pour les emprunts hypothécaires. Les consommateurs à faibles revenus et à forte exposition aux cryptomonnaies sont proportionnellement plus susceptibles de contracter un prêt hypothécaire, et le montant moyen du prêt hypothécaire est élevé par rapport au revenu moyen antérieur.

L’augmentation considérable de l’utilisation de bitcoins et autres «tokens», dont les valeurs sont nettement plus volatiles que celles d’autres classes d’actifs, pourrait présenter «un risque pour la stabilité financière s’il y a des effets de contagion sur les bilans des ménages ou sur les secteurs de l’économie réelle».

Des taux de défaillance faibles

Les résultats de la recherche suggèrent que l’endettement des consommateurs est corrélé à leur exposition aux cryptomonnaies. Ce qui offre «un enseignement important pour la surveillance future», estime l’OFR, car ce groupe pourrait entraîner des tensions financières, en particulier si ces types de consommateurs à haut endettement et à haut risque se retrouvent concentrés auprès d’institutions systémiques importantes.

Néanmoins, pour l’heure, les résultats montrent «qu’il y a peu ou pas de preuves de niveaux plus élevés de difficultés financières dans les dettes liées aux emprunts hypothécaires, automobiles ou de cartes de crédit parmi les consommateurs à forte exposition aux cryptomonnaies», précise l’OFR. Au contraire, les taux de défaillance restent relativement faibles dans ces populations observées. «Un constat particulièrement vrai pour la dette hypothécaire, où les taux de défaillance hypothécaires des consommateurs à faibles revenus et à forte exposition aux cryptomonnaies sont de 1,6 %.»