Le Bureau de la concurrence veut que Google vende deux de ses services. (Photo: Kin Cheung / La Presse Canadienne)
Le Bureau de la concurrence poursuit Google pour un comportement anticoncurrentiel allégué dans le secteur de la publicité en ligne et veut que l’entreprise vende deux de ses services et paie une pénalité.
L’organisme de surveillance affirme qu’une telle action est nécessaire parce qu’une enquête qu’il a menée sur Google a révélé que l’entreprise a «illégalement» lié ses différents outils de technologie publicitaire afin de maintenir sa position dominante sur le marché.
Le Bureau soutient que cette position dominante a découragé la concurrence des rivaux, freiné l’innovation, gonflé les coûts publicitaires et réduit les revenus des éditeurs.
L’annonce de jeudi renforce son enquête sur Google et le monde de la publicité en ligne, qui se résume en grande partie aux publicités présentées aux internautes lorsqu’ils visitent des sites Web.
Les propriétaires de sites Web proposent l’espace publicitaire comme moyen de générer des revenus, et les publicités sont généralement achetées et vendues par l’entremise d’enchères automatisées utilisant des plateformes sophistiquées.
Tout au long du processus d’achat et de vente, les entreprises utilisent une multitude d’outils qui aident à gérer l’inventaire publicitaire, facilitent les achats ou agissent comme intermédiaire entre les acheteurs et les vendeurs.
Un «contrôle quasi total» sur les outils technologiques
Le Bureau allègue que Google a «un contrôle quasi total» sur les outils collectivement connus sous le nom de pile de technologie publicitaire, car l’entreprise possède quatre des plus grands services technologiques de publicité en ligne utilisés au Canada: DoubleClick for Publishers, AdX, Display & Video 360 et Google Ads.
«Aucun autre fournisseur d’outils de technologie publicitaire n’a l’envergure et la portée de Google dans ce domaine ; en effet, plus de 200 milliards de transactions publicitaires sur le Web canadien sont passées par les outils de technologie publicitaire de Google en 2022», a déclaré le Bureau.
L’organisme estime que Google a une part de marché de 90% dans les serveurs publicitaires pour éditeurs, de 70% dans les réseaux pour annonceurs, de 60% dans les plateformes côté demande et de 50% dans les échanges publicitaires.
Cependant, Dan Taylor, vice-président de Google responsable de la publicité mondiale, maintient qu’il s’agit d’un «secteur hautement concurrentiel».
Il a dit dans une déclaration écrite que les récriminations du Bureau «ignorent un contexte de concurrence intense dans lequel les acheteurs et les vendeurs de publicité ont l’embarras du choix».
M. Taylor a ajouté que Google avait hâte de faire valoir ses arguments contre les allégations du Bureau.
Une pénalité de 3% des revenus
L’affaire est portée devant le Tribunal de la concurrence, un organisme quasi judiciaire qui entend les cas présentés par le commissaire à la concurrence concernant le non-respect de la Loi sur la concurrence.
Le Bureau demande au tribunal d’ordonner à Google de vendre son serveur publicitaire pour éditeurs DFP et sa plateforme d’échanges publicitaires AdX.
Il a également réclamé que l’entreprise paie une pénalité égale à trois fois la valeur des avantages qu’elle a tirés de pratiques anticoncurrentielles ou, «si ce montant ne peut être déterminé raisonnablement», 3 % des revenus bruts mondiaux de Google.
Le Bureau a déclaré que ces mesures contribueront à remédier à la façon dont «Google s’est positionné au centre de l’écosystème de technologie publicitaire et a utilisé son contrôle sur la pile de technologies publicitaire pour tirer illégalement parti de sa puissance commerciale sur un produit afin de renforcer sa position sur les autres».
L’organisme de surveillance a soutenu que plusieurs éléments l’ont convaincu que la position dominante de Google était «le fruit d’une volonté délibérée».
Le premier est que le Bureau allègue que Google a rendu son réseau publicitaire d’annonceurs uniquement disponible pour sa propre plateforme d’échanges publicitaires et, à son tour, a obligé les éditeurs à utiliser son serveur publicitaire pour accéder aux enchères en temps réel de sa plateforme d’échanges.
Le Bureau affirme que le deuxième est que Google a travaillé pour «fausser la dynamique des enchères» en donnant à sa propre plateforme d’échanges publicitaires un accès préférentiel à l’inventaire publicitaire, en prenant des marges négatives dans certaines circonstances pour désavantager ses rivaux et en dictant les conditions dans lesquelles ses propres éditeurs-clients pouvaient effectuer des transactions avec des outils technologiques publicitaires concurrents.
Les allégations du Bureau ont été élaborées au cours d’une enquête pluriannuelle qui remonte au moins à 2021, lorsqu’il a réussi à obtenir une ordonnance du tribunal obligeant l’entreprise à fournir des documents liés à son activité de publicité en ligne. Il a obtenu une deuxième ordonnance similaire plus tôt cette année.
Selon les directives du Tribunal de la concurrence, les répondants à des demandes comme celle déposée par le Bureau contre Google ont généralement 45 jours pour enregistrer une réponse. Le Bureau a ensuite 14 jours pour répondre.