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Les chefs de réseaux sociaux responsables des contenus dangereux?

AFP|Publié le 08 avril 2019

Les chefs de réseaux sociaux responsables des contenus dangereux?

Les patrons de groupes de réseaux sociaux pourraient être tenus personnellement responsables de la mise en ligne de «contenus dangereux», selon un projet présenté lundi par le gouvernement britannique, qui se veut à la pointe du combat sur ce sujet.

Dans un Livre blanc, les ministères de l’Intérieur et du Numérique promettent de légiférer pour établir des règles strictes afin que les compagnies du net «assument leurs responsabilités».

«Depuis trop longtemps, ces entreprises ne font pas assez pour protéger leurs usagers, particulièrement les enfants et les jeunes, des contenus dangereux», a déclaré la Première ministre Theresa May dans un communiqué. «Il est temps de procéder différemment».

Ces mesures, appelées à être mises en oeuvre dans quelques mois, sont une «première mondiale», a assuré le ministre chargé du numérique Jeremy Wright sur la BBC. «Personne n’a fait cela auparavant.»

L’Australie revendique toutefois elle aussi une action pionnière dans ce domaine, avec l’adoption, la semaine dernière, d’une législation instaurant des peines de prison pour les dirigeants de réseaux sociaux qui ne retireraient pas promptement les contenus extrémistes. 

«Devoir de protection»

L’exécutif britannique a indiqué mener des consultations «sur la possibilité d’imposer de lourdes amendes, de bloquer l’accès aux sites et, potentiellement, de mettre en cause la responsabilité individuelle des hauts dirigeants».

Le gouvernement veut introduire un «devoir de protection», qui impliquerait que les plateformes en ligne s’attaquent «aux contenus violents ou incitant à la violence ou au suicide, à la désinformation, au cyber-harcèlement et aux documents inappropriés accessibles aux enfants».

Outre les réseaux sociaux, les nouvelles règles s’appliqueraient aux «hébergeurs de fichiers, aux forums de discussion, aux services de messagerie, et aux moteurs de recherche».

Contre les fausses informations, un «code de déontologie» pourrait être instauré, et le recrutement d’équipes dédiées à la vérification de l’information imposé, «particulièrement pendant les périodes d’élection». Un régulateur indépendant sera mis en place, financé par l’industrie numérique, afin de s’assurer du respect de la règlementation.

Réagissant à ces propositions, Rebecca Stimson, responsable des politiques publiques pour Facebook au Royaume-Uni, a déclaré que les nouvelles règles «devraient protéger la société tout en soutenant l’innovation, l’économie numérique et la liberté d’expression». «Ce sont des sujets complexes», a-t-elle ajouté, se disant prête à travailler avec le gouvernement et le Parlement. 

«Gangsters numériques»

Cette annonce intervient après des appels croissants à réguler ce secteur.

En février, une commission parlementaire britannique avait appelé le gouvernement à agir pour empêcher les réseaux sociaux d’agir comme des «gangsters numériques». Le sujet avait gagné en acuité après l’échec de Facebook à empêcher la diffusion en direct sur sa plateforme des images du massacre de Christchurch (Nouvelle-Zélande) qui avait fait 50 morts en mars.

Les associations militant pour plus de régulation des plateformes internet ont salué la décision gouvernementale.

«Cela fait trop longtemps que les réseaux sociaux ont échoué à faire de la sécurité des enfants une priorité», a déclaré Peter Wanless, directeur de la Société nationale pour la prévention de la cruauté envers les enfants (NSPCC). «Il est grand temps de les forcer à agir pour protéger les enfants en vertu de règles contraignantes, assorties de lourdes punitions s’il ne le font pas», a-t-il ajouté.

Ian Russell, le père de Molly Russell, une adolescente qui s’était suicidée en 2017 à l’âge de 14 ans après avoir visionné des contenus liés à l’automutilation et au suicide sur Instagram, s’est félicité de ces mesures qui s’en prennent à la face « cachée et nuisible » d’internet.

Il s’est réjoui que le gouvernement «transforme finalement ses promesses en actes» après une «ère d’autorégulation» des réseaux sociaux qui n’a pas empêché «des contenus dangereux de devenir facilement disponibles en ligne, avec des conséquences tragiques».