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Les cryptos, une alternative aux dérives du gouvernement Trudeau?

François Remy|Publié le 21 février 2022

Les cryptos, une alternative aux dérives du gouvernement Trudeau?

En invoquant la loi sur les mesures d'urgence, le premier ministre Justin Trudeau a exigé des banques et autres fournisseurs de paiement qu’ils gèlent ou suspendent sans ordre de la cour les comptes associés aux militants. (Photo: Getty Images)

LES CLÉS DE LA CRYPTO est une rubrique qui décode patiemment l’univers de la cryptomonnaie et ses secousses boursières, industrielles et médiatiques. François Remy se donne pour mission d’identifier les entrepreneurs prometteurs, de décoder les progrès techniques et d’anticiper les impacts industriel et sociétal de cette monnaie numérique.


(Illustration: Camille Charbonneau)

La communauté crypto dans le monde s’inquiète du chemin emprunté par les autorités canadiennes face à quelques opposants politiques. Le gel des comptes financiers imposé aux personnes liées de près ou de loin aux blocages du «convoi de la liberté» relève du cas d’école. Il s’agit d’une involontaire démonstration illustrant pourquoi la finance décentralisée et les cryptomonnaies existent.

«Si les camionneurs bloquent les routes et que cela freine l’économie, très bien. Bloquer les routes est illégal et il y a des lois contre cela. Mais si le gouvernement n’est pas disposé à respecter les lois et recourt aux banques pour couper les moyens de subsistance des gens sans procédure normale, c’est un parfait exemple de ce que la technologie décentralisée sert à contrer», a déclaré samedi Vitalik Buterin face aux caméras de CoinDesk TV.

Le créateur russo-canadien d’Ethereum, la deuxième chaîne de blocs la plus populaire au monde, faisait référence aux manœuvres coercitives prises plus tôt dans la semaine contre les militants anti-mesures sanitaires. En invoquant la loi sur les mesures d’urgence, le premier ministre Justin Trudeau a exigé des banques et autres fournisseurs de paiement qu’ils gèlent ou suspendent sans ordre de la cour les comptes associés aux militants. La vice-première ministre du Canada et ministre des Finances Chrystia Freeland avait insisté sur le fait que le gouvernement voulait «suivre l’argent».

 

Technologies démocratiques

Cette situation inattendue qui fait le tour de la planète crypto démontre, selon Buterin, que les systèmes décentralisés ne relèvent pas de l’anarchie, mais, au contraire, participent activement à l’état de droit. Les cryptomonnaies servent de contrepoids citoyen face aux excès d’un gouvernement.

«Il ne s’agit pas d’être sans foi ni loi. Le gouvernement et la police peuvent toujours agir légalement et poursuivre les suspects, comme ils l’ont toujours fait, sans devoir enrôler les intermédiaires financiers. Utiliser les intermédiaires financiers pour contourner la loi est dangereux. Les alternatives décentralisées sont un bon moyen de limiter ce danger», a affirmé le jeune entrepreneur.

Début février, sous la pression des autorités qui leur avaient coupé accès aux plateformes de sociofinancement, les manifestants avaient déjà pu expérimenter un avantage de la chaîne de bloc Bitcoin qu’ils sous-estimaient jusqu’alors: la résistance à la censure. Quand on possède des BTC et que l’on souhaite en transférer à une autre adresse Bitcoin, personne ne peut s’opposer à cette transaction.

 

«Nous ne pouvons pas vous protéger»

Entre-temps, le gouvernement Trudeau s’est aussi attaqué aux cryptomonnaies en plaçant sur liste noire des adresses crypto associées au convoi des camionneurs. La Police provinciale de l’Ontario et la Gendarmerie royale du Canada ont ordonné à toutes les sociétés financières réglementées de cesser toute transaction à partir de 34 portefeuilles cryptos liés aux camionneurs-renégats. Des adresses majoritairement sur Bitcoin, mais également sur Ethereum, Litecoin, Monero et Cardano.

C’est le moment de «sortir votre argent» des plateformes centralisées, a conseillé Jesse Powell, le PDG de la cryptobourse Kraken. Préoccupé par l’usage de la force du gouvernement canadien, l’entrepreneur a néanmoins concédé qu’il serait «obligé de se conformer» aux injonctions des autorités. «Nous ne pouvons pas vous protéger. Reprenez vos cryptos et décaisser votre argent et n’échangez qu’en pair-à-pair».

Les principaux arguments contre le bitcoin et les milliers d’altcoins, à savoir la consommation énergétique, le manque de décentralisation réelle, les fraudes, semblent tout à coup insuffisants pour ignorer les cryptomonnaies en tant qu’outil de soutien à la démocratie.

Qui aurait imaginé que ce serait le Canada qui encouragerait l’adoption des «monnaies décentralisées» sous cet angle si particulier de la liberté?