Lululemon, MEC et Arc’teryx boycottent Facebook à leur tour
La Presse Canadienne|Publié le 30 juin 2020(Photo: 123RF)
Des entreprises canadiennes se sont jointes à une liste croissante de grandes marques internationales promettant de ne pas faire de publicité sur Facebook en juillet en raison du refus de l’entreprise de s’attaquer à la propagation de contenu haineux sur sa plateforme.
Les sociétés de vêtements de sport de Vancouver Lululemon Athletica, Mountain Equipment Co−op et Arc’teryx retirent leurs publicités payées de Facebook et se joignent à un boycottage qui est déjà soutenu par Coca−Cola, Unilever, Honda America, Patagonia et d’autres entreprises.
Les défenseurs du boycottage #StopHateForProfit — dirigés par des groupes de défense des droits civiques, incluant la Anti−Defamation League (Ligue anti−diffamation) et la National Association for the Advancement of Colored People (Association nationale pour l’avancement des personnes de couleur) — estiment que Facebook n’en a pas fait assez pour empêcher le contenu raciste, faux et dangereux, ou les suprémacistes blancs, de se retrouver sur sa plateforme.
Ils sont également déçus que le réseau social ait permis à ses utilisateurs d’appeler à la violence contre les manifestants luttant pour la justice raciale dans la foulée de la mort de plusieurs Noirs américains.
Le boycottage de MEC est entré en vigueur le 25 juin, date à laquelle l’entreprise a retiré son contenu et ses publicités payées de Facebook et Instagram jusqu’à la fin de juillet.
La société a déclaré qu’elle souhaitait «sensibiliser au contenu raciste et à la désinformation nuisible qui sont partagés sur ces réseaux sociaux».
«Nous demandons à Facebook de renforcer ses politiques de modération du contenu et de les appliquer de manière cohérente», a affirmé MEC dans un communiqué envoyé par courriel à La Presse canadienne.
Lululemon, quant à elle, a annoncé son soutien à #StopHateForProfit samedi, dans un message sur Twitter, en affirmant: «Nous pensons que nous avons tous la responsabilité de créer une société véritablement inclusive et nous engageons activement le dialogue avec Facebook pour rechercher un changement significatif.»
Dans ses messages sur Twitter soutenant le boycott, Arc’teryx a soutenu que les bénéfices de Facebook «ne vaudront jamais la promotion de la haine, du fanatisme, du racisme, de l’antisémitisme et de la violence».
Facebook, qui est établie à Menlo Park, en Californie, et possède également Instagram et Whatsapp, a affirmé dans un communiqué qu’elle investissait des milliards de dollars chaque année pour assurer la sécurité de sa communauté et travaillait en permanence avec des experts externes pour examiner et mettre à jour ses politiques.
La société a indiqué s’être ouverte à un audit des droits civiques et avoir banni 250 organisations suprémacistes blanches de Facebook et Instagram.
«Les investissements que nous avons faits dans l’intelligence artificielle font en sorte que nous trouvons près de 90 % du discours haineux avant que les utilisateurs nous le signalent, tandis qu’un récent rapport européen a révélé que Facebook avait traité en 24 heures plus de signalements de discours haineux que Twitter et YouTube», a indiqué le réseau social dans un courriel.
«Nous savons que nous avons encore du travail à faire, et nous continuerons de travailler avec des groupes de défense des droits civiques, la Global Alliance for Responsible Media (Alliance mondiale pour des médias responsables) et d’autres experts afin de développer encore plus d’outils, de technologies et de politiques pour poursuivre ce combat.»
Recul de la valeur de Facebook et de son fondateur
Le boycottage est important parce que les revenus publicitaires ont généré près de 69,66 milliards $US pour Facebook l’année dernière, et sont la plus importante source d’argent de l’entreprise, selon le cabinet d’études Statista.
Les préoccupations liées à la modération du contenu ont longtemps persisté dans l’entreprise, qui a souvent atterri dans le collimateur des régulateurs alors qu’elle éprouve des difficultés à équilibrer la liberté d’expression et sa responsabilité de protéger les utilisateurs de Facebook.
Bien que Facebook soit un outil précieux pour les entreprises à la recherche de clics et de clients prêts à piger dans leur portefeuille, le boycottage nuit plus à la société de médias sociaux qu’aux marques qui s’en éloignent, a estimé Joanne McNeish, professeure agrégée de marketing à l’Université Ryerson.
De nombreuses marques ne sont plus aussi dépendantes de Facebook qu’elles l’étaient autrefois parce qu’elles ont réalisé qu’Instagram était plus précieux pour attirer les jeunes clients et parce que Facebook a perdu certaines de ses capacités publicitaires plus ciblées depuis que les données de jusqu’à 50 millions d’utilisateurs de Facebook ont été utilisées à mauvais escient par la firme de données Cambridge Analytica.
«Les annonceurs disposent de diverses plateformes, selon le groupe cible recherché par l’entreprise, mais en ce moment, personne ne parle de boycotter Instagram», a souligné Mme McNeish. «Ils ne font que boycotter Facebook, et c’est une façon très traditionnelle de faire un boycottage en ce sens qu’ils attaquent le leader du marché.»
Après que des marques comme Verizon, Eddie Bauer, Levi Strauss and Co. et Mozilla ont retiré leurs publicités de la plateforme, l’action de Facebook a glissé de 8,3% à 216,08 $ US vendredi, enregistrant ainsi sa plus forte baisse en trois mois.
Le titre a rebondi quelque peu lundi après−midi après avoir encore chuté dans les échanges du matin, gagnant 4,56 $US à 220,64 $US.
La chute a effacé 56 milliards $ US de la valeur boursière de Facebook et 7,2 milliards $ US de la valeur nette de son fondateur, Mark Zuckerberg.
L’indice Bloomberg Billionaires estime maintenant que M. Zuckerberg vaut 82,3 milliards $ US et qu’il est la quatrième personne la plus riche après Jeff Bezos d’Amazon.com, le cofondateur de Microsoft, Bill Gates, et le patron de l’empire du luxe Louis Vutton Moet Hennessy, Bernard Arnault.
Malgré tout, Mme McNeish ne pense pas que ce recul pèsera beaucoup sur Facebook ou sur M. Zuckerberg. «Mark Zuckerberg a une longue tradition de ne pas vraiment se soucier de ce que les gens pensent», a−t−elle affirmé.
«C’est une énorme organisation, il peut encaisser un gros coup et être toujours rentable et continuer à fonctionner.»