«Facebook a décidé d’être déraisonnable, irresponsable et de commencer à bloquer les nouvelles», a expliqué mercredi le ministre du Patrimoine canadien, Pablo Rodriguez. (Photo: La Presse Canadienne)
Le gouvernement fédéral cessera d’annoncer sur les plateformes de Meta, Facebook et Instagram, pour protester contre les moyens de pression du géant de la technologie, à l’instar de certaines entreprises médiatiques québécoises. Le gouvernement du Québec, pour sa part, n’est pas disposé à emboîter le pas pour le moment.
«Facebook a décidé d’être déraisonnable, irresponsable et de commencer à bloquer les nouvelles», a expliqué mercredi le ministre du Patrimoine canadien, Pablo Rodriguez, lors d’une conférence de presse à Ottawa aux côtés de représentants du Bloc québécois et du Nouveau Parti démocratique.
Google, qui a pourtant lui aussi annoncé qu’il bloquera les nouvelles de sa plateforme, s’est toutefois «montré ouvert à la recherche d’une solution», a déclaré Pablo Rodriguez, ajoutant être «profondément convaincu» que les préoccupations du géant du web seront résolues par la réglementation.
En mêlée de presse, le premier ministre du Québec, François Legault, s’est pour sa part dit en accord à ce que les géants de la technologie contribuent aux médias qui produisent des nouvelles, mais il n’est pas prêt pour l’instant à boycotter Meta.
Il a ajouté que le gouvernement devait tenir compte des endroits où les Québécois s’informent. «C’est une nouvelle réalité, mais on n’est pas rendus à l’étape de boycotter. Pas pour l’instant», a-t-il soutenu.
Plus tôt en journée, Québecor et Cogego ont annoncé qu’ils retiraient sur le champ toutes leurs publicités des plateformes de Meta, Facebook et Instagram, pour protester contre les moyens de pression du géant de la technologie. Ils ont encouragé les autres entreprises, les organisations et les divers gouvernements à leur emboîter le pas.
Dans des communications transmises mercredi matin, les entreprises québécoises ont dénoncé l’approche de Meta, qui, selon Cogeco, souhaite «limiter le montant des redevances qu’elle devra payer aux entreprises responsables de rendre accessible un contenu d’informations crédibles».
Québecor renchérit en disant que cette décision de l’entreprise de Mark Zuckerberg «allait à l’encontre de toutes valeurs éthiques de n’importe quelle société croyant à l’importance d’avoir accès à un contenu fiable et de qualité, nécessaire à une saine démocratie».
Québecor et Cogeco incitent par ailleurs les autres entreprises, institutions et les divers gouvernements à leur emboîter le pas.
«Dans le cas du gouvernement fédéral, ce sont 11 millions de dollars (M$) d’investissements annuels qui sont dépensés chez (Meta), alors que seulement 10M$ de ces mêmes budgets sont investis auprès de l’ensemble des radiodiffuseurs canadiens», souligne Cogeco dans un article publié sur son site web.
La semaine dernière, le ministre Rodriguez avait évoqué en entrevue avec La Presse Canadienne un soutien aux salles de nouvelles advenant que Meta et Google mettent à exécution leur menace de bloquer l’accès aux nouvelles canadiennes sur leurs plateformes.
Dans la foulée de l’adoption de la Loi sur les nouvelles en ligne, le géant des réseaux sociaux Meta avait aussi annoncé mettre fin au contrat d’un programme de bourses qui soutient l’embauche d’un nombre limité de journalistes émergents au service de fil de presse de La Presse Canadienne. Google avait pour sa part annoncé qu’il mettrait fin aux accords existants avec les éditeurs locaux.
Sans appeler à un boycottage des géants du web, l’Association des agences de communication créative (A2C), qui représente une centaine d’agences québécoises, invite les annonceurs à augmenter la part de leurs investissements publicitaires dans les médias locaux. Elle invite les annonceurs à déployer au minimum 25% de leur budget publicitaire dans les médias canadiens.
Les médias sociaux sont devenus un canal incontournable pour la transmission des nouvelles, souligne A2C. Elle cite une étude de l’Académie de la transformation numérique de l’Université Laval qui indique que 42% des adultes québécois identifient les réseaux sociaux comme étant la source d’information la plus utilisée pour se tenir au courant des nouvelles et des actualités.
Le blocage des nouvelles de Meta «brimera l’accès au contenu journalistique de qualité», déplore sa présidente-directrice générale, Dominique Villeneuve, dans une lettre publiée sur son site. «Nous ne pouvons rester silencieux et inactifs face à la situation actuelle.»
La loi sur les nouvelles en ligne a été adoptée il y a deux semaines, mais elle entrera en vigueur dans six mois. Elle obligera alors Google et Meta à payer les médias d’information pour les nouvelles qu’ils partagent ou réutilisent d’une autre manière sur leurs plateformes. Ces géants du web devraient négocier avec les entreprises de presse un juste prix pour ce contenu partagé.