Les gouvernements étrangers attaquent les dissidents par divers moyens numériques, notamment le piratage, le suivi en ligne, le harcèlement sur les réseaux sociaux et les campagnes de diffamation. (Photo: 123RF)
Ottawa est invité à adopter une ligne plus dure au moment où des pays comme la Chine et l’Iran se tournent de plus en plus vers les technologies numériques pour cibler les militants et les dissidents vivant à l’extérieur de leurs frontières, y compris au Canada.
L’appel à l’action est contenu dans un nouveau rapport du Citizen Lab de la Munk School of Global Affairs de l’Université de Toronto, qui soulève également des inquiétudes quant au manque de soutien pour les personnes ciblées par de telles tactiques de répression numérique.
«Le gouvernement canadien doit prendre des mesures pour aider à prévenir ces abus et protéger les communautés canadiennes ciblées», lit-on dans le rapport de 38 pages publié mardi.
«Il existe un certain nombre de lacunes dans les politiques et les lois sur ces questions, que le gouvernement canadien doit commencer à combler.»
Le rapport du Citizen Lab est le plus récent à soulever des inquiétudes concernant la prolifération des technologies numériques qui a permis aux gouvernements étrangers de réprimer ou de cibler plus facilement les dissidents au Canada, dont plusieurs sont arrivés ici en tant que réfugiés et immigrants.
Pour faire valoir ce point, il détaille les expériences de 18 personnes qui ont déménagé ou fui au Canada et ont déclaré plus tard avoir été ciblées ou attaquées par divers moyens numériques, notamment le piratage, le suivi en ligne, le harcèlement sur les réseaux sociaux et les campagnes de diffamation.
De telles tactiques «deviennent rapidement la pierre angulaire» des efforts de répression à l’étranger, ajoute le rapport, en partie à cause de leur faible coût et du fait qu’elles sont difficiles à détecter et à retracer.
Parmi les personnes interrogées par le Citizen Lab figuraient d’anciens journalistes, des défenseurs des droits de la personne et des militants prodémocratie de Chine, d’Iran, de Syrie, d’Arabie saoudite, du Yémen, du Rwanda et d’Afghanistan, entre autres.
Les participants ont décrit une variété d’impacts sur leur santé mentale, sociale et physique du fait d’être ciblés, y compris des craintes pour leur sécurité et la sécurité de ceux avec qui ils communiquent dans leur pays d’origine, et un «effet dissuasif» sur leur travail militant.
«La répression transnationale numérique a un impact sérieux sur ces communautés, y compris sur leur capacité à entreprendre un travail militant transnational lié aux droits de la personne», lit-on dans le rapport.
«Pourtant, il y a peu de soutien pour les victimes qui subissent un tel ciblage et les efforts politiques du gouvernement canadien à ce jour ont été insuffisants.»
Ce ne sont pas seulement leurs propres organisations qui ont fourni un manque de soutien, mais aussi le gouvernement, car les forces de l’ordre et les agences de cybersécurité ont offert des réponses mitigées lorsque des incidents leur ont été signalés.
L’incapacité d’Ottawa à régler le problème «est troublante étant donné que le gouvernement Trudeau affirme accueillir les migrants et les réfugiés au Canada et fait de la promotion de la démocratie et des droits de la personne la pierre angulaire de sa plateforme politique», ajoute le rapport.
À cette fin, les chercheurs proposent plusieurs mesures pour maîtriser la situation, en commençant par des déclarations et des politiques claires établissant l’importance de protéger les communautés militantes et dissidentes au Canada.
Ils demandent également au gouvernement d’examiner comment la loi canadienne et les sanctions ciblées pourraient être utilisées contre les contrevenants, et exigent plus de transparence et des règles d’exportation plus strictes pour les entreprises qui offrent de telles technologies.
Le rapport du Citizen Lab envisage également une agence gouvernementale dédiée pour soutenir les victimes et mener des recherches sur de telles activités au Canada, une ligne d’assistance téléphonique pour signaler les incidents et des discussions avec les entreprises de médias sociaux à propos de ces activités.
«Alors que le gouvernement a commencé à faire face à la menace d’ingérence étrangère au Canada (…), il s’est principalement concentré sur les menaces numériques liées aux institutions démocratiques canadiennes, aux intérêts économiques et aux infrastructures essentielles», indique le rapport.
«La protection des droits et libertés des migrants et des réfugiés semble être peu préoccupante.»