QuadrigaCX: un ordinateur portable pourrait contenir les clés
La Presse Canadienne|Publié le 07 février 2019(Photo:123rf)
Dans un bureau de Toronto, un ordinateur portable pourrait contenir les clés permettant de débloquer des actifs numériques de 180 millions $, de l’argent virtuel possiblement perdu après la mort récente du jeune fondateur de l’une des plus importantes plateformes d’échanges de cryptomonnaie au Canada.
Gerald Cotten, chef de la direction de QuadrigaCX, voyageait en Inde le 9 décembre lorsqu’il est décédé subitement. Sa veuve, Jennifer Robertson, a déclaré que le résidant de la Nouvelle-Écosse âgé de 30 ans était la seule personne à avoir accès à l’ordinateur portable et aux clés numériques des portefeuilles censés contenir les Bitcoins et autres cryptomonnaies manquants.
Les experts du secteur des cryptomonnaies estiment qu’il est peu probable que les techniciens puissent récupérer les devises.
Environ 180 millions $ en cryptomonnaie et 70 millions $ en espèces sont dus aux quelque 115 000 utilisateurs de la plateforme.
Manie Eagar, PDG de DigitalFutures, basée à Vancouver, croit que l’ordinateur de Gerald Cotten est probablement protégé par une forme ou une autre de sécurité, mais que cet obstacle pourrait être surmonté avec les bons outils.
Le professeur de finance à l’Université de Calgary Alfred Lehar explique que la grande question est de savoir si l’ordinateur portable contient les clés du portefeuille.
« L’argent est là et tout le monde peut le voir, mais personne ne peut y accéder sans la clé privée », déclare l’expert en gestion des risques et en institutions financières à la Haskayne School of Business.
S’il n’y a pas de clé, la cryptomonnaie sera définitivement verrouillée.
« Il n’y a aucun moyen de pirater ce (portefeuille) en utilisant les méthodes de calcul que nous avons aujourd’hui, affirme M. Lehar. C’est impossible. »
La clé est généralement une longue séquence de chiffres et de lettres générée aléatoirement. Utiliser un ordinateur puissant pour deviner cette combinaison serait futile.
« Le nombre de possibilités équivaut à compter les atomes de l’univers, illustre le professeur. Puisque l’univers est très grand, il y a une infinité de possibilités pour ce nombre. (…) L’argent est essentiellement parti. Il est là, mais personne ne peut y accéder. »
Mardi, la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse a accordé à QuadrigaCX la protection contre ses créanciers et un arrêt des procédures de 30 jours.
Les experts consultés estiment tous deux que la débâcle de QuadrigaCX est gênante pour les relativement nouvelles bourses de cryptomonnaie canadiennes.
De plus, les allégations découlant de l’intrigante affaire, qui fait maintenant l’objet d’une enquête de la GRC, ne manqueront pas d’attirer l’attention des organismes de réglementation financière au pays, croit Alfred Eagar, président du conseil d’administration d’iBank Digital Asset, une nouvelle plateforme d’échange de cryptomonnaie basé à Vancouver.
Le secteur canadien des cryptodevises, qui comprend plus d’une douzaine de plateformes d’échange, est en grande partie non réglementé et ne fait l’objet d’aucune surveillance, contrairement au secteur bancaire qui est hautement réglementé.
Cette absence de règles et la nature décentralisée de l’industrie ont toutefois attiré l’attention d’investisseurs qui affirment que la technologie de la chaîne de blocs offre un système beaucoup plus transparent que les banques traditionnelles.