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Facebook a suspendu Donald Trump pour deux ans, et annoncé que les personnalités politiques ne bénéficieraient plus de traitement de faveur quand elles enfreignent les règles du réseau social, des mesures jugées insuffisantes à gauche, et liberticides à droite.
L’ex-président américain ne pourra revenir que quand les « risques pour la sécurité du public auront disparu », a précisé la plateforme, qui l’avait exclu temporairement le 7 janvier dernier pour avoir encouragé ses partisans lors de l’attaque du Capitole à Washington la veille, une décision sans précédent.
Cette interdiction a été prononcée en vertu d’une nouvelle règle sur mesure, créée par le groupe californien par rapport aux événements du 6 janvier, elle aussi annoncée vendredi. Elle prévoit des sanctions allant d’un mois à deux ans de suspension pour les personnalités publiques en cas de troubles et de violences, d’après un communiqué. Les récidivistes pourront être définitivement bannis.
Plus de six mois après sa défaite dans les urnes, Donald Trump continue de donner des maux de tête au géant des réseaux sociaux, écartelé entre souci de respecter la liberté d’expression et nécessité morale et économique d’assainir les échanges entre ses 2,85 milliards d’utilisateurs mensuels.
Facebook avait bien tenté de demander à son tout jeune conseil de surveillance d’évaluer la pertinence de l’exclusion pour une durée indéfinie de Donald Trump, mais l’instance avait renvoyé la balle dans son camp début mai.
« La décision de Facebook est une insulte aux 75 millions de personnes, et de nombreuses autres, qui ont voté pour nous lors de l’élection présidentielle frauduleuse de 2020 », a réagi dans un communiqué l’ancien chef d’Etat, ostracisé par la plupart des grandes plateformes depuis les émeutes qui avaient fait plusieurs morts et choqué le pays.
« Chaudron d’extrémisme »
Le conseil avait surtout appelé le réseau à clarifier ses règles « arbitraires » : « les mêmes règles devraient s’appliquer à tous les utilisateurs », avaient insisté ses membres internationaux et indépendants.
Dont acte : Facebook vient de mettre fin à l’immunité très controversée dont bénéficiaient les élus et candidats qui enfreignent ses règles, au nom de « l’intérêt du public à s’informer ».
« Quand nous évaluons des contenus en termes d’importance pour l’information, nous ne traiterons pas les propos des politiciens différemment de ceux des autres », a indiqué Nick Clegg, le directeur des affaires publiques de la firme.
« Donald Trump a montré comment un leader politique peut se servir des réseaux sociaux pour saper les institutions démocratiques, comme les élections et le transfert pacifique du pouvoir », a souligné Paul Barrett, professeur de droit à l’université de New York.
« Facebook a raison de changer de tactique et d’appliquer aux politiques ses règles contre les comportements néfastes ».
Mais de nombreuses ONG considèrent que le réseau a trop longtemps amplifié les propos inflammatoires du milliardaire républicain, et devrait l’exclure pour de bon, comme Twitter.
Le patron de la société, Mark Zuckerberg, « a admis que Trump a utilisé Facebook pour inciter à une insurrection violente. Malgré ça, Facebook continue d’envisager de rétablir le compte de Trump », s’est indigné Angelo Carusone, président de l’association Media Matters for America.
S’il revenait, la plateforme « resterait un chaudron d’extrémisme, de désinformation et de violence », a-t-il continué.
« We love you »
Mark Zuckerberg a longtemps refusé de jouer le rôle « d’arbitre de la vérité en ligne ».
Une position devenue intenable avec Donald Trump, prompt à minimiser la gravité de la pandémie ou à dénoncer, sans preuve, de supposées fraudes électorales. Autant de propos qui jettent de l’huile sur le feu dans un pays déjà très divisé.
L’invasion du Congrès, qui a fait plusieurs morts, a marqué un tournant. « We love you » (« je vous aime »), avait déclaré l’ex-locataire de la Maison-Blanche dans une vidéo pendant l’assaut.
Mais Facebook n’était pas revenu sur sa liste de personnalités politiques exemptées de certaines de ses règles et sanctions (sur la désinformation, notamment) afin que le public puisse se faire sa propre opinion.
Ce traitement de faveur suscitait beaucoup de critiques, y compris en interne.
La réticence de Facebook à retirer il y a un an des messages de Donald Trump, considérés comme des soutiens aux violences policières pendant les manifestations contre le racisme généralisé, avait été désavouée publiquement par des employés.
La plateforme et ses voisines, comme Twitter, ont durci leur modération des contenus, à grand renfort de signalements adossés aux messages problématiques.
Ces initiatives n’empêchent pas les démocrates de leur reprocher leur inefficacité à contenir la désinformation, tandis que les républicains les accusent de censure.
« Ils ne devraient pas avoir le droit de censurer et museler comme ça. Mais à la fin nous gagnerons », a assuré Donald Trump à ses supporters vendredi.