«Un bogue dans le code de Bitcoin pourrait le rendre sans valeur»
François Remy|Publié le 13 novembre 2023Le Bitcoin fait face à plusieurs critiques: il serait «trop volatile pour être une réserve de valeur», aurait «échoué comme moyen de paiement», possèderait un impact «délétère sur l’environnement», risquerait de se retrouver «remplacé par un concurrent» et reposerait économiquement sur «rien». (Photo: 123RF)
LES CLÉS DE LA CRYPTO. Volatilité excessive, gâchis écologique, absence de toute base économique, ces critiques du Bitcoin ont la vie dure. Autant d’idées reçues qui peuvent être réfutées ou ne constituent pas de préoccupations sérieuses, estime-t-on chez Fidelity, le numéro trois mondial des gestionnaires d’actifs. Les autres inquiétudes, elles aussi peu probables, doivent absolument être comprises par les investisseurs. L’infaillibilité informatique par exemple.
(Illustration: Camille Charbonneau)
Réviser les critiques persistantes de Bitcoin. Quel vaste chantier. C’est pourtant au travers de ce nouvel article d’analyse que les membres de la division Actifs numériques de Fidelity ont encore frappé. Les mêmes qui, rappelons-nous, nous avaient dernièrement expliqué les bonnes raisons d’investir dans Ethereum.
Cette fois, les analystes se penchent sur les griefs ressortant de façon récurrente des conversations avec les investisseurs institutionnels et des observations du grand public, alors que «le bitcoin reste non seulement le plus grand actif numérique par capitalisation de marché et que sa blockchain continue de se développer comme un réseau monétaire», insistent-ils.
Entre fausses idées légitimes et inconnues conséquentes
Dans un premier temps, la recherche de Fidelity s’emploie à déconstruire les mauvaises conceptions, pourtant déjà démystifiées à maintes reprises: Bitcoin serait «trop volatile pour être une réserve de valeur», aurait «échoué comme moyen de paiement», possèderait un impact «délétère sur l’environnement», risquerait de se retrouver «remplacé par un concurrent» et, indécrottable critique, reposerait économiquement sur «rien».
Tout un réquisitoire stérile qui peut être réfuté et ne devrait pas inspirer de craintes sérieuses, considèrent les analystes du géant financier. Mais cela ne signifie pas que le Bitcoin se montre irréprochable. «Nous croyons qu’il y a quelques préoccupations légitimes qui ont une certaine probabilité, même faible, de se produire et, par conséquent, les investisseurs devraient en avoir conscience», précise Fidelity Digital Assets.
Et aux côtés d’une pression réglementaire capable de ralentir l’adoption, le risque de désintéressement public envers la cryptomonnaie et les «incertitudes inconnues», la recherche se penche sur une dimension qui a déjà nourri de nombreux fantasmes: la sécurité informatique de la pionnière des blockchains publiques opérationnelles.
Sans problème depuis plus de 10 ans
Aussi fascinant puisse être ce monstre d’ingéniosité né en pleine Halloween
(ou lors de la Toussaint selon certains), venu concrétiser le rêve depuis les années 1980 de monnaie numérique, Bitcoin n’est qu’un assemblage d’ordinateurs exécutant le même code.
«Il est vrai que dans ses couches techniques les plus basses, Bitcoin n’est qu’un logiciel exécuté sur du matériel informatique, et comme nous le savons, les logiciels peuvent avoir des bogues ou des erreurs, ce qui les fait se comporter de manière imprévue ou non intentionnelle», remettent en perspectives plus minimalistes les analystes de Fidelity.
D’ailleurs, le réseau Bitcoin a connu deux incidents de ce genre plus tôt dans son histoire. Le premier remonte au mois d’août 2010, lorsqu’un acteur malveillant a pu exploiter un bogue pour créer… 184 milliards de bitcoins. Non seulement ces cryptomonnaies n’ont pas été créées par le processus de minage régulier, mais ils ont bien sûr dépassé «de loin» la limite conceptuelle de 21.
«C’était encore assez tôt dans l’histoire de Bitcoin pour que le(s) créateur(s), Satoshi, travaille(nt) encore activement sur le projet. Le bogue a été remarqué dans les heures qui ont suivi et une mise à jour du code a été créée et envoyée par Satoshi par la suite. Rapidement, suffisamment de nœuds de validation ont été mis à niveau et ont continué à construire sur la bonne version de la blockchain (où les 184 milliards de bitcoins n’existaient pas) et elle a dépassé la version boguée, soulignant le rôle de la communauté et du consensus dans le processus», poursuivent les auteurs.
Un deuxième bogue est survenu quelques années plus tard, en mars 2013, et a effectivement mis le réseau hors ligne pendant environ six longues… heures. Une mise à niveau de version du logiciel Bitcoin, comme il en est réalisé assez régulièrement pour apporter de petites améliorations ou des gains d’efficacité, a involontairement provoqué une division (fork) de la blockchain, donnant deux versions fonctionnant simultanément.
«Bien que les bitcoins des utilisateurs étaient en sécurité et n’étaient pas affectés, cela a obligé les grandes plateformes d’échanges et les détaillants à interrompre ou à suspendre leurs transactions. Le problème a été résolu une fois de plus grâce au processus de consensus des développeurs et des mineurs qui communiquent entre eux et reviennent volontairement à la version précédente pour tout resynchroniser. L’événement a fait baisser le prix du bitcoin de plus de 20% à aussi bas que 37$ sur certaines plateformes», se remémore-t-on chez Fidelity.
Infaillible jusqu’à présent
Depuis, plus aucun autre «temps d’arrêt» du réseau n’a été à déplorer. Autrement dit, Bitcoin peut se targuer d’une disponibilité de 100% pendant plus d’une décennie. Ou de 99,99% si l’on tient rigueur des bogues depuis sa création en 2009.
Comme le veut le mantra financier dans le secteur crypto, les performances passées ne présagent pas de performances à venir. Autant prévenir. La probabilité d’un bogue suffisamment grave, susceptible de torpiller le prix du BTC et couler temporairement le marché, n’est pas nulle.
Néanmoins, les analystes de Fidelity pensent que «si l’on ne peut pas exclure qu’un autre bogue ou une conséquence imprévue d’une mise à niveau ne se produise, la probabilité d’un tel événement est beaucoup plus faible, car le réseau est devenu plus résilient et davantage de développeurs continuent à travailler dessus au fil du temps.»
énième point fort de Bitcoin, le code source demeurant libre, cela permet à n’importe quelle personne (qui en les capacités techniques) de visualiser et tester la blockchain — des grandes entreprises aux développeurs indépendants.
Sans oublier l’effet de réseau puissant, incitant à redresser prestement toute dérive de Bitcoin, aime- t-on à penser chez Fidelity: «si un autre bogue est découvert, il est probable que ceux qui ont des intérêts particuliers et de grandes quantités de bitcoins et d’équipement (mineurs, etc.) seront incités à travailler ensemble pour le corriger rapidement».
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