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«À l’aide! Les réunions se multiplient et m’épuisent.»

Olivier Schmouker|Publié le 27 février 2024

«À l’aide! Les réunions se multiplient et m’épuisent.»

L'idée, c'est de corriger le tir en rendant chacune de vos réunions à la fois nécessaire et efficace. (Photo: Mapbox pour Unsplash)

MAUDITE JOB! est une rubrique où Olivier Schmouker répond à vos interrogations les plus croustillantes [et les plus pertinentes] sur le monde de l’entreprise moderne… et, bien sûr, de ses travers. Un rendez-vous à lire les mardis et les jeudisVous avez envie de participer? Envoyez-nous votre question à mauditejob@groupecontex.ca

Q. – «Dans notre PME, nous travaillons aujourd’hui en mode hybride, pour la plus grande satisfaction de tous, je pense. Mais moi, ça me pose tout de même un problème: ça nous oblige à avoir beaucoup de réunions dans la semaine, tantôt en personne, tantôt en virtuel, et ça m’épuise. Physiquement et mentalement. Comment changer ça?» – Sylvain

R. – Cher Sylvain, vous avez raison, nous tenons aujourd’hui plus de réunions que jamais. Microsoft a récemment dévoilé que le nombre de réunions hebdomadaires organisées par l’entremise de son application de communication collaborative Teams avait doublé pour chaque travailleur dans le monde depuis le début de la pandémie. Oui, vous et moi avons maintenant deux fois plus de réunions virtuelles qu’en 2020. Et, reconnaissons-le, le nombre de réunions en personne n’a, lui, aucunement diminué. Bien au contraire: dès que tout le monde se retrouve au bureau, on en profite pour se voir les uns les autres et jaser longuement à côté de la distributrice de café, pour tenir des réunions éclairs “One-on-One” (en tête-à-tête), ou encore pour une réunion d’équipe en début de journée d’un quart d’heure, tout le monde debout afin que personne ne s’éternise. Pas vrai?

Comment, donc, mettre le holà à cette frénésie de réunions? Certaines entreprises ont pris des mesures drastiques pour répondre à la surcharge de réunions. Par exemple, la plateforme de commerce en ligne Shopify encourage ses employés à refuser de participer aux réunions auxquelles ils ne pensent pas pouvoir apporter de valeur ajoutée, a instauré les mercredis sans réunion et interdit les réunions de plus de trois personnes. Autre exemple: l’entreprise technologique américaine TechSmith affirme avoir augmenté sa productivité en testant le concept du mois sans réunion.

Certes, ces mesures se sont peut-être bien révélées efficaces pour les entreprises en question, mais le hic, c’est que les solutions radicales ne sont que rarement applicables à d’autres. Mieux vaut, me semble-t-il, y aller avec des mesures plus douces, que vous pourrez adapter à votre guise, Sylvain.

Effectuez un audit de vos réunions

Passez en revue toutes les réunions récurrentes de votre agenda. Identifiez et conservez celles qui sont à la fois nécessaires et efficaces.

Puis, considérez attentivement chacune des autres, en vous posant objectivement la question suivante: «Est-elle vraiment nécessaire?»

Si la réponse est oui, conservez-là, mais regardez quels changements vous devriez lui apporter pour qu’elle devienne efficace. Et agissez en conséquence.

Et si elle n’est pas vraiment nécessaire, eh bien, la solution est simple: supprimez-la définitivement. Car elle n’est rien d’autre qu’une perte de temps.

Répondez aux trois questions qui tuent

Chaque fois qu’une nouvelle invitation à une réunion vous est envoyée, posez-vous les trois questions suivantes:

– Y a-t-il un objectif impérieux à réunir toutes ces personnes?

– Le contenu de la réunion nécessite-t-il vraiment un engagement et une interaction?

– N’y a-t-il aucun autre moyen de communiquer tous ensemble qui serait tout aussi efficace?

Si les trois réponses ne sont pas oui, alors c’est qu’il y a un problème, à tout le moins un moyen d’améliorer la réunion afin qu’elle devienne nécessaire et efficace.

Par exemple, un courriel soigneusement rédigé et documenté peut parfois faire l’affaire. Ou encore, il peut être envisagé de créer un document partagé dans lequel chacun peut présenter ses idées, et quelqu’un se chargera d’en rédiger une synthèse.

Sabrez dans la durée

Très souvent, les réunions sont tout simplement trop longues. Raccourcissez-les donc.

Par exemple, au lieu de tenir une réunion d’une heure, limitez-la à 45 minutes. Ça laissera un quart d’heure de répit à ceux qui devront enchaîner avec une autre réunion.

Atténuez la fatigue Zoom

Selon Jeremy Bailenson, le directeur du Virtual Human Interaction Lab de l’Université Stanford, quelques petites modifications aux réunions virtuelles peuvent permettre d’atténuer ce qu’on appelle communément la «fatigue Zoom».

– Sur votre écran, dissimulez l’image de vous-même. Car le simple fait de pouvoir nous voir nous amène à sans cesse nous regarder et juger, ce qui représente une lourde charge mentale.

– Diminuez au maximum la taille de la fenêtre vidéo. Car cela “éloignera” les autres de vous, et les mettra ainsi à une distance suffisante pour que vous n’ayez plus à sans cesse analyser leurs signaux non verbaux. Ce qui, mine de rien, représente également une lourde charge mentale.

– Ajustez les réglages de votre écran afin que l’image ne soit pas agressive pour vos yeux: luminosité, hauteur de la caméra, etc.

Par ailleurs, Jeremy Bailenson souligne un point important qui est souvent occulté concernant les réunions virtuelles. Nous croyons souvent qu’elles sont un gain de temps: vite organisées, vite tenues, etc. Ce faisant, nous nous trompons, car elles occasionnent des tâches chronophages sans qu’on le réalise véritablement: «Un exemple dont personne ne parle est que des participants à une réunion virtuelle prennent souvent une demi-heure pour se faire beau alors que la réunion elle-même ne dure qu’un quart d’heure. Peut-on alors parler de gain de temps?», dit-il.

D’où l’intérêt, me semble-t-il, de vraiment réfléchir à la pertinence de chacune de nos réunions virtuelles. Oui, sont-elles à la fois nécessaires et efficaces?

À ce sujet, la coach américaine Randah McKinnie raconte que durant sa carrière elle a travaillé au sein d’une entreprise de logiciels qui avait mis en place un moyen subtil pour réduire le nombre et la durée des réunions au strict nécessaire. Il s’agissait d’une application concoctée à l’interne qui imposait à chaque participant à une réunion de saisir, de manière parfaitement anonyme, son salaire. Pendant la réunion, l’application sonnait chaque fois que la réunion coûtait 1 000 dollars supplémentaires. Et à la fin, elle fournissait le coût total de la réunion pour l’entreprise. «Ça faisait réfléchir, et ça incitait chacun à se montrer à l’avenir le plus efficace possible, croyez-moi!», dit-elle.

Pour finir, Sylvain, un dernier point. Une récente étude de Slack Technologies menée auprès de 10 000 employés de bureau montre que les gens saturent après deux heures de réunion dans une même journée. Leur productivité se met dès lors à chuter, de manière irrémédiable. D’où l’intérêt de ne surtout pas mettre trop de réunions dans une même journée, un réflexe qu’ont malheureusement aujourd’hui nombre de gestionnaires qui entendent ainsi “profiter” du fait que les membres de leur équipe sont tous au bureau certains jours de la semaine.

En passant, le penseur français Louis de Bonald aimait à dire: «Rapprocher les hommes n’est pas le plus sûr moyen de les réunir».