Aussi talentueux soit-il, un employé détestable est une véritable nuisance pour la performance globale de l'équipe. (Photo: Gregory Hayes pour Unsplash)
MAUDITE JOB! est une rubrique où Olivier Schmouker répond à vos interrogations les plus croustillantes [et les plus pertinentes] sur le monde de l’entreprise moderne… et, bien sûr, de ses travers. Un rendez-vous à lire les mardis et les jeudis. Vous avez envie de participer? Envoyez-nous votre question à mauditejob@groupecontex.ca
Q. – «J’ai la chance d’avoir dans mon équipe une personne hyper talentueuse. Mais celle-ci est aussi une personne détestable: dernièrement, elle a humilié devant tout le monde une collègue qui avait commis une bévue. Comment la faire changer d’attitude sachant que je ne peux pas me permettre de la perdre?» – Yanis
R. – Cher Yanis, le problème auquel vous êtes confronté est, en vérité, très simple à régler. Pour vous indiquer ce qu’il convient de faire lorsqu’on compte dans son équipe un employé à la fois talentueux et détestable, je vais m’appuyer sur les propos du psychologue américain James Waldroop lorsqu’il lui a été demandé en 2001 par la Harvard Business Review (HBR) ce qu’il convenait de faire dans un cas de figure similaire. «Le bon gestionnaire ne tient jamais compte de l’argent que produit un employé, ni même des éventuels talents exceptionnels qu’a celui-ci, si cet employé-là met le bazar dans l’équipe», dit celui qui a dirigé les programmes de MBA en développement de carrière de la Harvard Business School et qui a ensuite cofondé CareerLeader, une agence de conseil en carrière. Car, en vérité, son attitude détestable nuit à la performance globale de l’équipe, sans parler du bien-être, voire de la santé mentale, des autres membres.
Autrement dit, Yanis, vous n’avez d’autre choix que d’intervenir au plus vite. De manière ferme et radicale, mais sans pour autant pousser cet employé vers la porte de sortie.
James Waldroop considère qu’un employé détestable est comme un enfant qui ne connait pas les limites à respecter, et qui s’essaye et s’essayera continuellement jusqu’à ce quelqu’un finisse par les lui montrer. D’où l’intérêt, selon lui, d’avoir une discussion en face à face avec cet employé, en jouant avec deux leviers: flatter son ego (pour ne pas le voir quitter l’équipe) et contrer son attitude détestable (pour le faire changer).
Par exemple, cela peut se traduire par des phrases du genre:
– «Tu es un employé remarquable et tu es vraiment à tes affaires, mais il faut que je te dise que si, par une journée de forte chaleur, tu venais à te déshydrater, je ne crois pas que quiconque t’apporterait un verre d’eau».
– «Si tu parvenais à contrôler un peu mieux tes remarques désobligeantes et ton ego, je suis sûr que tu deviendrais un employé exceptionnel, oui, exceptionnel. Mais je crains de parler dans le vide, car tu ne donnes aucun signe de vouloir changer d’attitude en ce sens.»
«L’idée, c’est d’alterner le chaud et le froid dans une même phrase, explique James Waldroop. D’envoyer le message qu’il y a un gros problème et qu’il faut le régler maintenant, sans quoi, vous, le gestionnaire, allez être contraint de sévir.»
Au besoin, vous pouvez poursuivre en allant plus loin dans la sévérité.
– «J’aimerais beaucoup pouvoir te garder parmi nous, mais il faut que tu comprennes que tu fais plus de mal que de bien, que ton attitude nuit grandement à la performance globale. Ton manque de professionnalisme fait des dégâts. Et ça, ce n’est pas tolérable.»
– «Tu as donc le choix. Soit tu choisis de travailler avec nous, et tu changes d’attitude. Soit tu choisis de travailler contre nous, en ne changeant rien et en allant voir ailleurs.»
L’astuce, c’est d’avoir cette discussion le vendredi, en fin de journée. Et à la toute fin de la discussion, de dire à l’employé: «J’attends ta réponse lundi matin.» Comme ça, il va mariner toute la fin de semaine, et prendre donc le temps de peser le pour et le contre.
Selon le cofondateur de CareerLeader, la résultante de cette discussion ne peut être prédite. Parfois, l’employé va rester et changer. D’autres fois, il va partir. Mais dans tous les cas de figure, «le gestionnaire aura agi en bon gestionnaire, et c’est là le plus important».
Voilà, Yanis. Faites preuve de fermeté envers l’employé détestable, votre équipe ne s’en portera que mieux.
En passant, le duc de Lévis a dit dans ses «Maximes politiques»: «Réprimez, vous aurez moins à punir.»