De gauche à droite, le directeur du marketing et des communications de Zetane, Jason Behrmann, ainsi que les deux cofondateurs, Guillaume Hervé et Patrick St-Amant. (Photo: courtoisie)
Le fonctionnement opaque de l’intelligence (IA) nuit à son adoption par les entreprises, mais la jeune pousse montréalaise Zetane espère conquérir le monde avec ses outils qui permettent de tester et comprendre l’IA utilisée par ses clients.
Déjà choisi dans le programme d’Hyper Croissance Québec en juin, cette entreprise en phase de croissance (scale up) vient d’être accueillie dans le programme d’accélération AI@Centech qui est appuyé par la multinationale Thales.
«On nous a dit qu’on a été sélectionné parce qu’on a ciblé un vrai problème existant et parce que notre plateforme marche, elle n’est pas que théorique», affirme Guillaume Hervé, président et cofondateur de Zetane qui a été créée en 2018 et qui compte près de 20 employés.
L’obstacle identifié, c’est que ceux qui mettent en place les algorithmes de l’IA sont incapables d’expliquer comment la machine arrive au résultat et encore moins pourquoi cela ne fonctionne pas quand l’IA débouche dans un cul-de-sac. Les outils développés ici au Québec par l’autre cofondateur, Patrick St-Amant, permettent en quelques sortes de voir ce qu’il y a sous le capot d’une manière qui peut être comprise par ceux qui ne sont pas experts des algorithmes.
La PME a par exemple aidé Thales, qui connaissait des difficultés avec des applications pour des véhicules autonomes. «Ils ne trouvaient pas ce qui coinçait, mais nous avons identifié ce qui bloquait. Ils ont ensuite modifié leur techno pour se sortir de ce cul-de-sac.»
Il souligne que le phénomène de la «boite noire» (c.-à-d. qu’on ne sait pas comment l’IA prend à sa décision) est bien documenté dans l’industrie. Avec la complexification de l’IA, les écueils sont plus ardus à résoudre, car il faut non seulement analyser le fonctionnement des algorithmes, mais aussi les données qui les nourrissent.
«De grandes firmes comme Accenture, Deloitte et d’autres ont montré que de plus de 80% des solutions de I’IA développées en entreprise sont paralysées, car les chercheurs qui les mettent en place n’arrivent plus à expliquer comment on arrive aux résultats et encore moins pourquoi cela ne fonctionne pas quand cela bloque», dit-il.
Tester le réel
Zetane permet aussi de tester de l’IA qui oeuvre dans des environnements complexes comme dans des véhicules autonomes ou en aviation. Sachant qu’une erreur d’interprétation des données peut avoir des conséquences fatales, il est essentiel de procéder en amont à des analyses rigoureuses qui miment le réel. Par exemple, pour une voiture autonome, comment l’IA va-t-elle traiter l’information s’il y a de la poussière ou de la boue? Quand la machine doit-elle laisser la place à une intervention humaine? Zetane aide les propriétaires d’IA à voir plus clair.
L’aéronautique est une des industries qu’elle vise particulièrement. Une collaboration avec Thales pourrait lui permettre de mieux arrimer son offre aux besoins des entreprises de ce domaine afin de percer ce marché.
«Si Thales a recours à nos services, cela nous donnera de la crédibilité auprès d’autres gros joueurs», précise Guillaume Hervé.
Il note que l’avantage de sa solution, c’est qu’elle s’applique à de l’IA dans divers domaines comme la construction, le secteur pétrolier et l’imagerie médicale.
«On a des clients un peu partout dans le monde, dit le patron. Notre solution fonctionne avec de l’IA qui roule avec des données aussi variées que de l’ADN, de la photo ou de la vidéo.»
Cette amplitude augure donc bien pour son avenir. Avec un chiffre d’affaires annuel d’environ 1,5 million de dollars (M$), l’entreprise vise le cap des 10 M$ d’ici trois ans.
Améliorer la confiance de l’IA
Zetane bâtit également de l’IA. C’est d’ailleurs en faisant ce travail qu’elle a constaté le problème de la «boite noire» qu’elle veut maintenant résoudre. Parmi ses mandats, elle a collaboré avec l’entreprise de construction Pomerleau. Pour cette dernière, elle a créé de l’IA qui extrait l’information des dessins d’ingénierie afin d’estimer le temps de construction.
Mais au-delà de régler des pépins concrets, Zetane croit être en mesure de favoriser l’expansion de l’IA, dont certains ratés ont miné l’appui du public ou des organisations. Par exemple, un système de traitement des prêts automatisé utilisé par des institutions financières qui rejetait les demandes des gens issus de minorités.
Si elle arrive à identifier ces écueils en amont ou même à les corriger si on s’en aperçoit par la suite, cela permettra d’accroitre la confiance envers l’IA, estime Guillaume Hervé.