Vos avantages sociaux bonifient peu le bien-être de vos employés


Édition du 10 Avril 2024

Vos avantages sociaux bonifient peu le bien-être de vos employés


Édition du 10 Avril 2024

Par Catherine Charron

Selon William Fleming, les changements structurants à l’organisation, tels que l’évaluation des performances, seraient plus bénéfiques pour l’amélioration du bien-être que les programmes d’aide aux employés et les massages. (Photo: 123RF)

RESSOURCES HUMAINES. Qu’il s’agisse de massages, d’outils de gestion du stress ou du temps, d’accompagnement temps, d’accompagnement pour la santé financière ou encore d’un service pour améliorer le sommeil, le constat est le même: les mesures de prévention et de promotion de saines habitudes de vie offertes par l’employeur ont peu d’effet sur le bien-être des employés.

Ainsi, si votre environnement de travail est anxiogène, c’est en apportant des changements organisationnels que vous arriverez à vos fins, et non en offrant le nec plus ultra des avantages sociaux.

C’est la conclusion qu’a tirée William Fleming, un chercheur du Wellbeing Research Centre, affilié à l’Université d’Oxford, dans son étude diffusée dans l’Industrial Relations Journal en janvier 2024.

Observant une démocratisation et une implantation rapide de telles mesures au sein des entreprises du Royaume-Uni, le docteur en sociologie a décidé de se pencher sur leurs réelles retombées. «Je n’étais pas convaincu que les preuves étaient là pour soutenir une telle popularité, explique-t-il en entrevue avec Les Affaires. Le scepticisme des chercheurs universitaires les plus critiques allait aussi en augmentant [à leur égard].»Ces chercheurs reprochent aux entreprises de ne cibler que la progression de la capacité de chaque individu à gérer le stress que leur incombe leur boulot, plutôt que de s’attarder aux conditions de travail comme tel, écrit-il dans son rapport.

Pour en avoir le coeur net, William Fleming a analysé les réponses collectées en 2017 et en 2018 par le «Britain’s Healthiest Workplace Survey», une étude menée auprès de plus de 46 000 Britanniques employés par 233 entreprises.

«Les participants [qui profitent de ces mesures] ne semblent pas mieux lotis», indique l’auteur dans «Employee well-being outcomes from individual-level mental health interventions:Cross-sectional evidence from the United Kingdom». Seul le bénévolat semble avoir des répercussions tangibles sur le bien-être des personnes sondées qui en font avec la bénédiction de leur patron.

Comme chaque étude de la sorte, la sienne n’est pas à l’abri de certaines distorsions, reconnait le chercheur. Les personnes plus stressées ont peut-être été plus nombreuses à participer, par exemple.

Il est toutefois d’avis que l’imposante taille de son échantillon permet bel et bien de conclure à l’absence de retombées positives enregistrées. «Ça remet en question l’utilité des interventions du point de vue individuel pour améliorer le bien-être des travailleurs et leur place dans les recommandations politiques», écrit-il dans les pages du Industrial Relations Journal.

 

Deux avenues distinctes pour doper le bien-être

Les employeurs peuvent travailler sur deux fronts pour galvaniser le bien-être des membres de leur équipe, rappelle William Fleming dans son rapport:en apportant des changements structurants à l’organisation ou en investissant dans des dispositions qui affectent les individus directement.

Or, bien que de nombreuses recherches aient montré que la première avenue engendre des retombées positives, les entreprises misent davantage sur la deuxième, déplore-t-il. Les programmes d’aide aux employés, les formations pour gérer le stress ou les massages, par exemple, sont ainsi préférés aux mesures servant à réviser le climat de travail.

Pourtant, en se basant sur ses résultats et sa revue de la littérature scientifique, William Fleming est d’avis que «les interventions organisationnelles, telles que les changements d’horaires, les pratiques de gestion, les ressources en personnel, l’évaluation des performances ou la conception des emplois, semblent plus bénéfiques pour l’amélioration du bien-être».

Le seul «bienfait»qu’il ait pu répertorier, c’est de donner l’impression à certains répondants que ces coups de pouce de l’employeur contribuent à leur bien-être, malgré l’absence de résultats probants qui démontrent leur efficacité. En d’autres termes, le simple fait d’avoir accès à ces mesures conforte le travailleur, bien qu’il n’en retire que peu d’avantages à terme.

Si ces mesures ne parviennent pas à réduire le niveau de stress de l’employé, «il y a bel et bien un danger que [celui-ci] se blâme lui-même»avant de reprocher à l’avantage social son inefficacité, avance le chercheur.

 

Revoir ses priorités

William Fleming espère que la lecture de ses résultats incitera les dirigeants à repenser leur stratégie d’investissement dans le bien-être de leurs employés afin de minimiser le stress induit par le boulot.

Ils pourraient par exemple cesser de réduire leurs dépenses dans les mesures préventives et inefficaces qu’il a recensées et s’attaquer à revamper leurs conditions de travail si leur budget est limité. «Ils devraient dans un premier temps s’assurer d’offrir de bons emplois», résume-t-il. Si une réallocation des fonds est nécessaire, il encourage d’effectuer un méticuleux plan de communication pour éviter les représailles ou les réactions négatives de la part des salariés qui accordent de l’importance à ces avantages sociaux. «Indiquer en quoi on améliore l’environnement de travail devrait contribuer à apaiser les inquiétudes», selon lui.

Cela ne signifie pas pour autant qu’il faille complètement tirer un trait sur ces mesures, nuance-t-il, un milieu de travail sain allant généralement de pair avec elles.

«C’est d’ailleurs ce qui est recommandé», rappelle-t-il.

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