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Lever les obstacles à la rentabilité des distilleries

Benoîte Labrosse|Édition de la mi‑juin 2023

Lever les obstacles à la rentabilité des distilleries

Les deux tiers des distilleries québécoises étaient déficitaires en 2022, selon une étude technico-économique commandée par l’UQMD. (Photo: 123RF)

INDUSTRIE DES ALCOOLS. Si l’univers des spiritueux québécois est foisonnant, plusieurs distillateurs sont loin d’être prospères. La majoration et la gestion de l’offre sont pointées du doigt par l’Union québécoise des microdistilleries (UQMD), qui appelle le gouvernement à modifier en profondeur le contexte réglementaire entourant son industrie.

Les deux tiers des distilleries québécoises étaient déficitaires en 2022, selon une étude technico-économique commandée par l’UQMD, qui représente «autour de 75% des distillateurs actifs», selon son président, le cofondateur de la Distillerie du St. Laurent, Joël Pelletier.

«Lorsqu’on que l’on vend notre propre produit sur place, la Société des alcools du Québec (SAQ) exige quand même le versement de frais d’exploitation, ce qui représente une iniquité par rapport à d’autres alcools», explique-t-il. Ainsi qu’entre les détenteurs de permis de production artisanale et industrielle. Davantage encore si une version révisée du récent projet de loi 17 est adoptée (voir autre texte).

Interrogée à ce sujet, la société d’État — qui relève du ministère des Finances — souligne qu’«elle ne fait pas les lois», mais «qu’une réduction de la majoration de l’équivalent de deux dollars par bouteille» est maintenant appliquée aux ventes sur les lieux de production, résume son directeur de catégories spiritueux, produits de célébration et produits du Québec, Simon Bourbeau.

 

Vers un retour à la gestion de l’offre?

Les distilleries souffrent également de l’absence de gestion de l’offre à la SAQ, souligne Joël Pelletier. 

Rappelons qu’à la demande de l’industrie, la société d’État a changé il a près de cinq ans ses règles d’introduction de nouveaux spiritueux. L’appel d’offres annuel s’est transformé en acceptation en continu de la quasi-totalité des spiritueux québécois. Or, comme le nombre de distillateurs est entre temps passé d’une dizaine à plus de 70, cette méthode cause un embouteillage sur les tablettes.

«Chaque succursale de la SAQ choisit les produits de spécialités qui correspondent aux besoins et aux demandes de sa clientèle », précise Simon Bourbeau. Entre les 633 spiritueux et 109 prêts-à-boire recensés à la fin mars, le choix peut se révéler complexe. «Les producteurs ont un rôle à jouer ; nous les encourageons fortement à aller faire des représentations et des dégustations de leurs produits en succursale», fait-il remarquer.

De son côté, l’UQMD se désole que la rentabilité soit devenue davantage une question mathématique que gustative. «Les distillateurs qui s’en sortent sont ceux qui soumettent un maximum de produits dans un maximum de catégories, sans égard à la demande réelle», affirme Joël Pelletier.

Cela dit, «la SAQ s’est engagée à revoir la façon d’intégrer et de sortir des produits [de ses succursales], dans une volonté de retourner à une saine gestion de l’offre », révèle le président de l’UQMD. Une intention que confirme Simon Bourbeau. «Il est trop tôt pour se positionner, mais on a commencé une discussion collaborative avec l’industrie afin de mettre en place des règles et des stratégies pour à la fois mettre le client au centre de nos décisions et soutenir les distilleries.»

Le directeur aimerait que le dossier soit «assez avancé» à pareille date l’an prochain, mais se garde bien d’avancer un échéancier plus précis.