La crise de croissance de l’ESG touche-t-elle à sa fin?
Le courrier des lecteurs|Publié le 11 novembre 2022«Les gestionnaires d’actifs devront faire évoluer leurs approches.» (Photo: 123RF)
Un texte de Milla Craig, fondatrice et présidente de Millani et Éric St-Pierre, directeur exécutif de la Fondation Familiale Trottier
À lire les rapports récents qui traitent de l’évolution des actifs qualifiés ESG (environnement, social et gouvernance), on comprendrait que les 3 lettres pourraient être perçues comme voulant dire Evasif — Sermonneur et Globalement flou.
En fait, l’ESG est un outil de gestion du risque permettant d’améliorer les rendements ajustés en fonction du risque à long terme. Mais l’ESG va au-delà de la gestion du risque. L’ESG permet au système financier de contribuer à la transition vers un monde plus inclusif et une planète viable. L’ESG sert ainsi à propulser une nouvelle économie qui requière des capitaux importants pour surmonter les défis environnementaux et sociaux de notre siècle. Malgré son importance, ses pratiques ne sont pas encore arrivées à maturité.
Lire aussi: Le Grand championnat canadien ESG dévoile ses lauréats
En mars 2022, nous avons lancé le Grand championnat canadien ESG, une compétition de type Dans l’œil du dragon qui regroupait des gestionnaires d’actifs canadiens dans une compétition dont le prix était d’importance: un mandat de gestion de 104,5 millions de dollars. Le processus d’évaluation s’est échelonné sur plusieurs mois durant lesquels nous avons été témoins d’événements, aux États-Unis et en Europe, qui ont démontré l’importance d’un rehaussement et d’une uniformisation des normes. Quand les règles sont claires, les détenteurs d’actifs et leurs épargnants bénéficient d’une plus grande transparence sur l’utilisation des fonds et d’une concurrence plus saine entre les gestionnaires d’actifs.
Pour certains, ESG équivaut à faible rendement et écoblanchiment. Un processus de validation rigoureux pourrait remédier aux inquiétudes que certains peuvent soulever. Toutefois, ces efforts individuels ne peuvent remplacer des normes internationales qui préciseront les contours de l’appellation «ESG».
Les juges du Championnat ESG ont vécu ce que l’écosystème ESG vit depuis cinq ans: le Far West. Entre l’impact, le vert et le durable, tous les fonds ne sont pas égaux. Parmi les firmes participant à la compétition, certaines ont utilisé une variété de normes et de définitions très créatives dans leurs stratégies d’investissement. Parfois, il était difficile de différencier le jargon «marketing» des véritables processus et politiques ESG. Étonnamment, les firmes concurrentes disposant de plus de ressources et de moyens n’ont pas eu le dessus dans la compétition.
Ne vous méprenez pas: les firmes canadiennes qui ont participé au championnat ne prennent pas l’ESG à la légère. Cependant, le secteur a besoin d’améliorer ses pratiques. Grâce au règlement européen sur la divulgation financière durable — mieux connu sous son acronyme SFDR pour Sustainable Finance Disclosure Regulation — et le momentum actuel sur les normes de divulgation ESG aux États-Unis, nous disposons d’une feuille de route pour améliorer la situation. La lutte contre l’écoblanchiment nécessitera une approche collaborative soutenue. Les gestionnaires d’actifs devront faire évoluer leurs approches. Les deux paliers de gouvernements devront intervenir et harmoniser les normes et définitions. Enfin, les détenteurs d’actifs devront surmonter leurs appréhensions et inciter le secteur à en faire plus.
Lire aussi: Encore difficile de définir les règles ESG
Il n’y a pas qu’une seule façon d’intégrer les facteurs ESG dans les pratiques d’investissement. Nous retenons du Championnat ESG que plusieurs gestionnaires d’actifs canadiens bien établis offrent des produits ESG fiables. Ces gestionnaires font un travail impressionnant d’intégration des facteurs ESG dans l’ensemble de leurs opérations, en améliorant la transparence, la performance des fonds et la façon dont leurs stratégies sont communiquées.
Pour tous les détenteurs d’actifs qui ont participé au processus et jugé des propositions, il n’y a pas eu des gagnants et des perdants. Chaque firme participante comme chaque détenteur d’actifs, en mettant les efforts nécessaires, ont montré que nous sommes capables de finir tous gagnants. Il en va de la résilience de nos épargnes et de l’impact positif que peut avoir nos investissements sur nos ambitions pour un monde inclusif et un climat viable.