I.P. Park, de LG Electronics, sur scène au CES 2020. (Image: LG)
Si vous n’avez pas entendu l’expression «intelligence artificielle» au cours des deux dernières années, vous vivez résolument sous une roche. L’expression est utilisée de toutes les façons imaginables, pour identifier à peu près n’importe quel calcul informatique qui peut être fait pas le processeur le plus minimal imaginable.
C’est pourquoi l’arrivée sur scène de Jean-François Gagné, président d’Element AI, en ouverture du Consumer Electronics Show, lundi dernier, était plus que bienvenue. Même sans qu’on s’en rende compte, elle était attendue depuis longtemps.
Aux côtés du président et directeur de la technologie de LG Electronics, le Dr I. P. Park, M. Gagné a dévoilé une échelle découpant en quatre l’évolution de l’intelligence artificielle. Ces quatre niveaux sont les suivants : conscience de son environnement, collaboration, compréhension des besoins de l’utilisateur, et pleine autonomie.
Est-ce qu’un aspirateur connecté réellement capable de nettoyer le plancher sans aucune intervention humaine est un idéal à atteindre? «C’est un exemple, mais nous on voit plutôt une interaction entre divers genres d’appareils.» Par exemple, le réveil-matin peut informer la voiture d’un rendez-vous plus tôt qu’à l’habitude, et celle-ci sera prête à partir à la bonne heure.
C’est exemple illustre le troisième niveau (sur quatre) d’intelligence artificielle tel que défini par Element AI. Cette échelle d’IA a été la première chose présentée sur scène par la direction de LG Electronics, ce qui n’est pas rien. Ce niveau, qu’on résume par une forme de compréhension de la «causalité» dans le comportement humain (si on fait ceci, c’est pour cela), n’est pas encore réellement existant, et on ne sait pas exactement quand il le deviendra.
L’IA, un fouillis à démêler
«C’est un peu comme les cinq niveaux de conduite autonome, du côté de l’automobile», illustre Philippe Beaudoin, cofondateur d’Element AI et directeur de la recherche de la jeune pousse montréalaise.
«Ce sont des niveaux scientifiquement valables. Ils reposent sur ce que les chercheurs académiques font. L’objectif est de permettre à toute l’industrie de s’ancrer sur quelque chose de concret. On souhaite créer un cadre qui sera adopté par tout le monde.»
«Les gens de LG sont venus nous voir. On les aide à déterminer ce qui peut être rapidement intégré à leurs produits, ce qui est peut-être un peu plus risqué à lancer en ce moment, et on a d’autres projets plus avancés dont on ne peut pas parler maintenant», résumait ensuite Jean-François Gagné, en entrevue.
«L’IA pour les consommateurs, qu’est-ce que ça signifie? C’est le fouillis, actuellement. La première chose à faire c’est de définir la technologie et là où on veut qu’elle se rende.»
Évidemment, les projets sur lesquels Element AI travaillera conjointement avec LG Electronics cadrent déjà dans la vision qu’avait l’entreprise montréalaise de la technologie, ce qui ne nécessitera pas de grands changements à l’interne, ni même de mobilisation plus intensive de ses employés.
À l’inverse, ceux-ci auront accès à un vaste bassin de données d’utilisation de produits électroniques en tout genre, grâce à l’imposant catalogue de produits du partenaire coréen : téléphonie, télévision, électroménagers, et tout ce qui porte le logo «ThinQ» de LG aidera ainsi Element AI à mieux évaluer quel pourrait être le rôle d’une IA réellement utile et efficace dans un contexte de consommation grand public.
Une année charnière pour Element AI
Ces derniers mois, Element AI a procédé à une série d’annonces de partenariats plutôt stratégiques, celui avec LG Electronics étant le plus récent, mais pas le dernier. «On a des partenaires qui étaient pressés de faire des annonces, d’autres qui préféraient attendre qu’on se fasse une plus grosse réputation avant de s’afficher», nuance Jean-François Gagné.
Présent dans l’assurance, dans le transport de marchandises, dans la finance et, maintenant dans l’électronique grand public, l’entreprise montréalaise est bien placée pour influencer sur une définition globale de l’IA qui semble pour le moment plutôt flou. En imposant ses quatre niveaux, et créant éventuellement des normes, est-ce qu’elle compte devenir l’équivalent, pour ainsi dire, d’un Dolby pour des applications d’IA?
«C’est un peu ce qu’on souhaite. On s’adresse aux entreprises, on ne s’adresse pas directement aux consommateurs.» Risque-t-on de voir le sceau d’Element AI sur des technologies d’IA comme si c’était un standard? Probablement pas. Mais l’esprit de la chose tente Jean-François Gagné. «C’est un peu vers ça qu’on se dirige», concède-t-il.
Il faudra voir dans les prochains mois si cette proposition des quatre niveaux d’IA sera reprise ailleurs. Element AI promet d’autres annonces au fil de l’année, qui devraient l’aider à séduire les investisseurs, l’entreprise soulignant qu’une nouvelle ronde de financement pourrait avoir lieu dans les prochains mois.
Chose sûre, l’engouement envers l’intelligence artificielle n’est pas moins élevé qu’il l’était au début d’Element AI. Celle-ci commence à dessiner les contours de ce qu’elle compte devenir lorsqu’elle sera financièrement autonome. Ce pont entre la recherche fondamentale et la commercialisation de solutions pour entreprises n’est pas une mince affaire, mais on sent que ça comment à se cimenter.
Après tout, ce n’est pas tous les jours qu’une entreprise montréalaise inaugure une conférence de la trempe du Consumer Electronics Show…
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