(Illustration: Camille Charbonneau)
LES CLÉS DE LA CRYPTO. Adopter les actifs numériques? «Tout le monde devrait s’y engager, assure Deloitte, des comités de direction aux départements responsables de la gestion du risque, des finances, de la comptabilité, des opérations, des technologies, de la communication et des aspects légaux». La multinationale de la consultance n’appelle pas exactement à la tokenisation pure et simple des entreprises, mais insiste, dans son récent rapport sur l’usage des cryptomonnaies en affaires, et sur le fait que l’intégration des cryptomonnaies représente un «engagement significatif».
«C’est une décision bien plus importante que d’adopter une nouvelle forme de paiement. Cela demande de repenser largement toutes les questions stratégiques fondamentales et la façon dont l’entreprise entend gérer les complexités opérationnelles», estiment conjointement les neuf signataires du document, issus des divisions Blockchain et actifs digitaux, Taxes, Risque, ainsi qu’Audit et assurance chez Deloitte.
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Bref, les collaborateurs internes et externes d’une entreprise qui se lancent dans la crypto devront idéalement investir du temps et redoubler d’efforts de compréhension, de formation, de réalisation. Par chance, implémenter les monnaies numériques peut se mener de manière incrémentale, étape par étape. Mais l’adoption ne pourra pas échapper à de nouveaux processus et contrôles. «C’est aussi pourquoi cela demande un fort leadership au niveau de la direction», poursuivent les auteurs.
À quoi bon?
Eh bien, les actifs numériques se fraient un chemin dans de nombreuses industries. Les clients comme les prestataires de services commencent à mieux cerner les avantages potentiels des cryptos. Des arguments logiques qui devraient déjà motiver toute entreprise à «envisager de se pencher et d’examiner la pertinence des cryptos pour leurs affaires» et pousser les dirigeants à fournir «un point de vue clair et une ligne de conduite appropriée» sur le sujet.
Il doit bien exister des éléments raisonnables justifiant que de grandes enseignes acceptent désormais les paiements en bitcoin pour acheter toutes sortes de produits ou services, de l’épicerie aux billets d’avion, en passant par l’immobilier. Bien que plus lente que prévu, l’adoption des cryptos se montre de plus en plus commune dans toutes sortes d’applications commerciales ou d’investissement. C’est que les actifs numériques recèlent autant de défis imposants que d’incitants solides.
Afin de nourrir les réflexions, les experts de Deloitte énumèrent une série de motivations qui ont amené certaines entreprises à déjà sauter le pas de la crypto. En termes commerciaux, les actifs digitaux donneraient accès à de nouveaux utilisateurs, permettant même de toucher «une clientèle plus avant-gardiste et disposant de revenus pour des biens et services de luxe». Au-delà de ces potentiels nouveaux clients, recourir aux cryptos quotidiennement dans ses opérations pourraient aider une entreprise à développer de nouveaux moyens de commerce innovants.
Sur le plan économique, les cryptos pourraient servir d’alternative ou de compensation à l’argent liquide dont la valeur peut souffrir de l’inflation. L’indiscutable risque de volatilité des actifs-crypto à prendre en compte ne réfute pas le fait que certains ont extrêmement bien performé ces dernières années.
Alternative valable aux «vraies» monnaies
En termes stratégiques, introduire les cryptos peut aider à stimuler en interne la sensibilité des collaborateurs à l’égard de ces technologies particulières. Notamment en anticipation de la réponse des institutions monétaires à l’adoption du bitcoin et de ses rejetons.
«L’introduction des cryptos peut aider à positionner une entreprise dans cet espace émergent qui pourrait inclure dans un avenir proche les monnaies numériques de banques centrales (CBDC)», soulignent les conseillers.
De surcroît, mécaniquement, une meilleure connaissance des technologies concrétisées par bitcoin peut créer de nouvelles dimensions d’investissement et une nouvelle dynamique des flux de capitaux au travers de placements traditionnels qui auraient été tokenisés.
«Les cryptos offrent certaines options qui ne sont simplement pas possibles avec les monnaies fiduciaires», assure Deloitte, prenant l’exemple de la programmabilité des cryptomonnaies qui permet «une redistribution précise des revenus en temps réel, tout en améliorant la transparence».
Avant d’entreprendre l’adoption des cryptos, toute entreprise devra évidemment toujours se poser les bonnes questions, dont, en priorité, savoir si ce projet s’aligne à ses propres objectifs, à ses activités, à ses clients, à sa culture… Toute société n’aura pas forcément besoin de détenir du bitcoin dans son bilan ni même de proposer des transactions en altcoins. Autant le savoir avant de «descendre dans le terrier du lapin», pour reprendre l’expression empruntée par la communauté crypto à Lewis Carroll, reflétant l’entrée dans un pays des merveilles.