Nouveaux échéanciers, nouveaux enjeux

Offert par Les Affaires


Édition du 17 Juin 2020

Nouveaux échéanciers, nouveaux enjeux

Offert par Les Affaires


Édition du 17 Juin 2020

Édith Jacques, associée au sein du groupe de droit des affaires de Lavery: « S’il y a une deuxième vague à l’automne, d’autres délais pourraient s’ajouter parce que l’incertitude va persister et que les acheteurs vont vouloir attendre davantage. En même temps, s’il y a une deuxième vague, certaines firmes ne passeront pas à travers. » (Photo: 123RF)

FUSIONS ET ACQUISITIONSImpossible d’y échapper: la pandémie amène bien des entreprises qui avaient prévu une fusion-acquisition cette année à revoir l’échéancier de la transaction. Pourquoi, quels délais cela pourrait-il entraîner, et quelles conséquences risquent d’en découler? 

Depuis la mi-avril, très peu de transactions ont été réalisées, observent les intervenants interrogés par Les Affaires. Le monde des F&A s’est mis sur pause. Selon eux, les transactions qui devaient clôturer au printemps seront, dans la plupart des cas, clôturées à l’automne. Ainsi, deux transactions qui devaient être clôturées le 30 avril et le 31 mai, chez Phoenix Partners, seront par exemple, dans le meilleur des cas, clôturées le 30 août et le 30 septembre. 

De manière générale, les raisons expliquant les reports sont multiples, explique Édith Jacques, associée au sein du groupe de droit des affaires de Lavery à Montréal. Dans certains cas, les acquéreurs désirent laisser retomber la poussière. Ils veulent laisser le temps à l’économie, et à leur propre entreprise, de se stabiliser, et veulent aussi de voir si leur cible est solide.

« J’ai des clients qui ont repoussé leur transaction à l’automne parce qu’ils veulent voir comment l’entreprise qu’ils avaient ciblée va se sortir de la crise, question de ne pas faire d’acquisition pour rien », dit Édith Jacques. Dans d’autres cas, la transaction est plutôt ralentie que repoussée. 

« Certaines entreprises continuent de vouloir aller de l’avant parce que l’acquisition demeure stratégique, mais depuis deux mois, tout le monde est beaucoup sollicité par la gestion de la crise, dit Édith Jacques. C’est sûr que les dossiers de fusion-acquisition, c’est moins prioritaire. » 

Financement au ralenti 

La mise en place des dossiers financiers prend également plus de temps puisque les banquiers sont eux-mêmes occupés à gérer la crise, et les besoins immédiats de leurs clients, ce qui peut retarder certaines transactions. 

Dans des cas comme ceux-ci, les transactions seraient plutôt repoussées de quatre à six semaines, plutôt que quatre ou cinq mois. 

Naturellement, les décisions sont plus faciles à prendre si rien n’avait encore été signé, note Jean-Simon Deschênes, un avocat associé du groupe de droit des affaires de Langlois avocats qui se spécialise en F&A. « Ainsi, la plupart d’entre ceux qui n’avaient pas finalisé leur contrat d’achat ont mis leurs projets sur la glace, alors que la majorité de ceux qui avaient signé poursuivent la transaction. » 

Nouvelles modalités de paiement 

La crise risque-t-elle d’influencer les prix de vente? Cela dépend de plusieurs facteurs, notamment, d’où l’entreprise en est dans sa transaction. « Si le contrat est signé, que le vendeur ne veut pas perdre sa transaction, et que l’acheteur invoque la clause de Material Adverse Change, qui permet d’annuler un contrat dans certains contextes, c’est possible que les parties décident de renégocier les termes », explique Félix Bernard, un autre avocat chez Langlois qui se spécialise en F&A. 

Et si rien n’avait été signé, il pourrait là y avoir de belles occasions d’acheter pour moins cher, quoique cela pourrait être risqué. Dans l’événementiel, par exemple, les entreprises ont été beaucoup touchées, et il pourrait certes y avoir des occasions d’affaires. En même temps, personne ne peut dire quand, et si, l’industrie se relèvera. 

Ce qui risque peut-être de se produire plus souvent, c’est une renégociation des modalités de paiement pour les transactions qui sont entamées, expliquent les avocats de Langlois. Les entreprises pourraient ainsi envisager l’ajout d’une clause de « earn-out » (ou de contrepartie conditionnelle). 

« S’il y a moins de raisons de croire que l’entreprise acquise sera profitable, en raison des incertitudes économiques, vous voulez minimiser les risques. Alors vous pouvez essayer d’ajouter une telle clause pour faire échelonner les paiements », dit M. Deschênes. Plutôt que de verser 100 % du montant de l’acquisition à la clôture, il pourrait être possible de verser 60 % à la clôture, et 10 % par an durant les quatre années suivantes. 

« Les paiements pourraient aussi être conditionnels à l’atteinte de certaines cibles de revenus, ajoute Jean-Simon Deschênes. Une chose est sûre, pour l’instant, tout le monde est de bonne foi, et les vendeurs comprennent qu’ils n’ont pas le choix d’accepter de partager le risque s’ils veulent vendre. » 

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