Rana Ghorayeb indique qu'Otéra Capital veut diversifier son risque, mais aussi ouvrir son terrain de jeu parce qu'être lié à un seul marché ne lui donne pas beaucoup d’options. (Photo: Otéra Capital)
Otéra Capital internationalise de plus en plus de son portefeuille pour réduire le risque, optimiser les rendements et maximiser les occasions d’affaires qui se pointent à l’horizon sur un marché immobilier en mutation.
En entrevue en marge d’une allocution qu’elle donnera mercredi midi devant le Cercle Canadien, la présidente et cheffe de la direction d’Otéra Capital, Rana Ghorayeb, indique que la filiale immobilière de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) veut saisir les occasions d’investissements à l’étranger provoquées par la dislocation de certains marchés.
«Lorsque je suis arrivée il y a cinq ans, le portefeuille était principalement un portefeuille canadien en majorité prêts à terme, explique-t-elle. Avec un portefeuille de 30G$, on ne peut pas tout mettre au Canada. Nous voulons diversifier notre risque, mais aussi ouvrir notre terrain de jeu. Être lié à un seul marché ne nous ne donnait pas tellement d’options.»
Cette stratégie est désormais bien implantée. Otéra a ouvert un bureau à New York en janvier 2022, et 35% de son portefeuille est désormais américain. Un changement assez drastique sur cinq ans, convient Rana Ghorayeb, mais qui a ouvert beaucoup d’occasions.
«Aujourd’hui, aux États-Unis, il y a une dislocation qu’on ne voit pas au Canada, explique-t-elle. C’est là qu’on est en train de trouver des transactions avec des rendements plus élevés, et c’est pour ça qu’on se déploie un peu plus aux États-Unis. Il y a des pertes liquidités dans le marché immobilier commercial qui créent un gouffre et nous donnent la chance d’embarquer encore plus.»
Une première
Otéra a franchi un autre jalon majeur en bouclant sa première transaction au Royaume-Uni au cours de la dernière semaine. Sans entrer dans les détails à cause d’une entente de confidentialité, la présidente d’Otéra Capital révèle que la transaction, qui touche plus qu’un seul actif, implique un partenaire international très renommé ainsi qu’un portefeuille dans un secteur très porteur et diversifié à travers le Royaume-Uni.
«Comme premier coup pour la CDPQ avec Otéra au Royaume-Uni, je suis très satisfaite de cette transaction, affirme Rana Ghoyareb. Ce n’est encore que le début pour les États-Unis et le Royaume-Uni.»
Le prochain marché visé sera l’Australie. Tout comme les États-Unis et le Royaume-Uni, Rana Ghoyareb souligne qu’il s’agit d’un pays fondamentalement très similaire en termes de fonctionnement, de juridictions légales, de taxes, par rapport au Canada.
Otéra Capital a toutefois décidé d’utiliser une méthode différente pour pénétrer dans le marché australien. Elle ira de manière indirecte pour commencer en sélectionnant un gestionnaire qui va décider des investissements à venir.
Ultimement, Rana Ghorayeb vise un portefeuille de 20% au Québec, entre 35% et 40% aux États-Unis et voir une croissance de marchés comme le Royaume-Uni et l’Australie. Elle n’exclut pas d’ouvrir des bureaux dans ces deux marchés, particulièrement au Royaume-Uni si Otéra y gagne plus de traction.
«Je pense qu’il faut être stratégique et tactique, précise-t-elle. Ce ne sont pas des pourcentages qui déterminent les décisions. Ultimement, nous voulons un portefeuille équilibré et diversifié en termes de risques.»
Québec et Canada
Dans la stratégie d’Otéra, le Canada demeure le socle du portefeuille, quelque chose qui absorbe les chocs et qui leur permet d’aller ailleurs dans le monde pour profiter d’occasions d’affaires, le but ultime demeurant de fournir un rendement aux déposants.
«Ce qui est important, c’est de ne pas dénaturer le portefeuille, mais nous voulons tout de même capturer les occasions qui se présentent à nous», soutient Rana Ghorayeb.
Elle ajoute que la filiale de la CDPQ a mis en place une stratégie spécifique pour le Québec. Otéra a financé plus de 1000 immeubles à ce jour au Québec et détient encore 172 positions dans 12 régions du Québec.
«Nous voulons faire plus ici chez nous et je pense qu’Otéra a un rôle à jouer, estime-t-elle. Il y a tellement de choses à faire au Québec pour avoir un impact encore plus positif. Nous voulons apporter notre support aux entrepreneurs d’ici, participer pour atténuer la crise du logement, convertir des immeubles et participer pour élever les édifices aux normes environnementales d’aujourd’hui.»
Elle veut également apporter le support d’Otéra aux entrepreneurs qui veulent sortir du Québec.
Marché immobilier complexe
Toute cette stratégie doit de plus être articulée dans un marché immobilier extrêmement complexe. Le télétravail et le travail hybrides sont là pour de bon et les achats en ligne ont fortement augmenté depuis le début de la pandémie. Cela a grandement modifié le paysage des immeubles à bureaux, mais aussi celui du secteur industriel, qui peine à répondre à la demande, entre autres pour des entrepôts qui peuvent stocker les colis commandés sur le web.
Il manque également de logements, ce qui met une forte pression sur les prix et la demande tous les édifices multilogements.
Il faut de plus ajouter la hausse des taux d’intérêt depuis 2022 à l’équation immobilière partout dans le monde.
«Le positionnement d’Otéra à travers tout cela, c’est de conserver un portefeuille très résilient, avec des projets bien analysés, avance Rana Ghorayeb. Ce que nous recherchons, ce sont des partenaires de qualité qui possède une vision et une belle feuille de route.»