L'économie circulaire, une tendance majeure en génie


Édition du 20 Mars 2024

L'économie circulaire, une tendance majeure en génie


Édition du 20 Mars 2024

Fondée en 2014, Pyrowave a développé une technique innovante pour transformer le plastique en matière première. (Photo: 123RF)

MOIS DU GÉNIE. Au cours de la décennie qui vient, l’économie circulaire sera une tendance incontournable qui fera pression sur la main-d’œuvre dans l’industrie, prévoit l’Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ). Cette réalité s’accompagnera de défis, notamment de formation, mais aussi d’occasions d’affaires.

Pyrowave s’y connaît en économie circulaire. Fondée en 2014, l’entreprise de Montréal a développé une technique innovante pour transformer le plastique en matière première. En novembre dernier, elle annonçait également avoir mis au point une technologie de nanopurification visant à éliminer les additifs toxiques et les contaminants dans les plastiques. Une innovation prometteuse puisque la contamination des polymères freine le recyclage de cette matière.

« La circularité est au cœur de notre mission. On ferme la boucle », dit Jonathan Bouffard, vice-président aux produits à Pyrowave.

Le vice-président reconnaît toutefois que le prix demeure un facteur déterminant dans les décisions d’approvisionnement. Les matières premières propres, recyclées, sont souvent plus chères que les matières vierges. Sans changement législatif, l’adoption de l’économie circulaire risque donc de se faire plus lentement.

Il reconnaît néanmoins que les ingénieurs auront un rôle crucial à jouer dans la transition.

« En tant qu’ingénieur, on a le bagage technique pour élaborer des solutions, dit Jonathan Bouffard. Mais il reste des changements radicaux à faire pour que la circularité soit réellement intégrée à notre modèle économique. »

 

Mieux former

Pour s’assurer que la nouvelle génération d’ingénieurs est bien outillée pour relever le défi, l’École de technologie supérieure (ETS) s’affaire à mieux enseigner les principes de l’économie circulaire.

Comme il est compliqué d’ajouter un cours en la matière au baccalauréat — cela demanderait le retrait d’un autre cours au programme —, l’établissement a adopté une démarche différente.

« Pour augmenter le contenu en circularité dans le programme du bac, on a développé une trousse pédagogique que l’on rend disponible aux professeurs pour qu’ils puissent l’enseigner à travers le prisme de leur propre discipline », explique Daniel Normandin, directeur du Centre d’études et de recherches intersectorielles en économie circulaire (CERIEC) de l’ETS.

Aux cycles supérieurs, soit à la maîtrise et au doctorat, l’ajout de cours est plus simple. Le CERIEC développe donc en ce moment des cours sur l’économie circulaire auxquels les étudiants pourront s’inscrire dès l’automne prochain.

Une initiative importante parce que les ingénieurs, même s’ils ont les outils techniques nécessaires à sa mise en place, ne sont pas toujours familiers avec le concept d’économie circulaire et ce qu’il implique, estime Daniel Normandin. « Dans l’industrie du génie, il reste du travail à faire, observe-t-il. On n’est pas aussi conscientisé que l’on devrait l’être. Pourtant les ingénieurs sont des incontournables, leur rôle est crucial. S’ils n’embarquent pas, on n’y arrivera pas. »

Heureusement, les choses évoluent pour le mieux, remarque le directeur. Le dernier colloque annuel de l’OIQ, par exemple, présentait un grand forum sur la question. Idem à Genium360, une association d’ingénieurs qui a tenu un événement annuel sur ce sujet.

« En bref, ça évolue, résume Daniel Normandin. Mais il faut continuer de former, d’informer, de sensibiliser et d’expliquer aux ingénieurs la contribution qu’ils peuvent apporter à l’économie circulaire. »

 

Mieux concevoir

Pour mieux recycler, il faudra mieux concevoir, explique le directeur du CERIEC. « L’adoption de la circularité dans nos modèles économiques implique de repenser les produits, dit-il. Ils devront être réparables, plus robustes, fabriqués à partir de matières recyclées et démontables pour être plus facilement recyclables. »

Les occasions pour les ingénieurs seront donc nombreuses.

Le vice-président de Pyrowave est d’accord : pour lui, les produits devront à l’avenir être conçus pour faciliter le recyclage. Cela signifie par exemple d’éviter de multiplier les matériaux pour un produit qui pourrait être conçu avec un seul. Une boîte de soie dentaire, par exemple, ne sera pas recyclée si elle intègre différents types de plastique : trop compliqué de démonter le tout. Les ingénieurs auront donc un travail à faire sur le plan de la conception des produits.

Daniel Normandin souligne que le secteur du génie devra également travailler fort sur un autre ensemble de questions pointues et techniques, comme celles qui sont liées à la fabrication additive.

Il note que ce type de fabrication, soit l’impression 3D, permet de réduire le gaspillage de matières premières. Cependant, elle produit des pièces qui ne sont pas toujours aussi performantes que les pièces fabriquées en fabrication soustractive, comme l’usinage. Elles sont par exemple souvent moins robustes.

« Les ingénieurs doivent donc travailler davantage pour améliorer la fabrication additive, dit Daniel Normandin. Le rôle de l’ingénieur en sera un de premier plan. Les occasions ne manqueront pas dans la décennie qui vient. »

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