Jour 10: grands barrages, fiscalité, et loi 96 au menu
La Presse Canadienne|Publié le 06 septembre 2022Le chef du Parti conservateur du Québec (PLQ), Éric Duhaime, sera à Montréal. (Photo: La Presse Canadienne)
Québec — François Legault a toujours flirté avec l’idée de relancer la construction de grands barrages hydroélectriques et la présente campagne électorale ne fait pas exception.
Mardi, en ce dixième jour de la campagne électorale, le chef de la Coalition avenir Québec (CAQ) est revenu à la charge, en affirmant que s’il est rapporté au pouvoir le 3 octobre il demandait à Hydro-Québec, qui emmagasine les surplus pour plusieurs années encore, d’examiner la pertinence d’ériger de nouveaux barrages, afin de répondre aux besoins énergétiques du Québec au cours de la décennie à venir et à ceux liés à la capacité d’exporter notre électricité.
Dans le passé, il disait vouloir bâtir «la baie James du XXIe siècle». En 2018, il parlait de créer une alliance avec l’Ontario pour répondre aux besoins énergétiques du futur.
«Je veux qu’on regarde pour construire des barrages au Québec», a dit le premier ministre sortant, mardi matin, lors d’un point de presse à Bécancour, devant des gens d’affaires, se disant convaincu que le Québec devait augmenter sa capacité de production électrique dans les dernières décennies.
Le Québec, a-t-il calculé, aurait besoin de 100 térawattheures (Twh) additionnels d’ici 2050 pour atteindre la carboneutralité.
Il souhaite que les études soient le plus tôt possible, «dans les prochains mois», la conception et la construction d’un barrage pouvant prendre jusqu’à 15 ans, un délai qu’il juge trop long.
«Ça va nous prendre beaucoup d’électricité pour remplacer les hydrocarbures», a soutenu M. Legault, se disant «excité» par ce projet qui contribue à le faire «rester en politique».
Mais il est resté avare de détails, ce qui a contrarié les partis d’opposition.
Le porte-parole de Québec solidaire (QS), Gabriel Nadeau-Dubois, un accusé M. Legault d’«improviser» et de «pelleter le problème par en avant».
«J’aimerais ça qu’on demande à M. Legault quelles rivières il veut harnacher pour faire ses barrages, a raillé M. Nadeau-Dubois. François Legault envoie la facture aux générations futures.»
Le Parti libéral du Québec (PLQ) a lui aussi écarté l’idée de construire de nouveaux barrages. Dominique Anglade mise plutôt sur le développement de l’hydrogène vert, ainsi que sur les énergies éoliennes et solaires.
De son côté, le Parti québécois (PQ) n’a pas fermé la porte, mardi, à la construction de nouveaux barrages au Québec, tout en estimant que M. Legault brûlait les étapes.
En octobre 2021, le PDG d’Hydro-Québec, Sophie Brochu, n’avait affirmé n’avoir aucune intention de construire des barrages «dans un avenir prévisible».
De son côté, le Parti libéral (PLQ) a plutôt choisi de parler de fiscalité des entreprises, mardi.
Un éventuel gouvernement libéral voudrait élargir la déduction pour les petites entreprises (DPE) pour que les travailleurs autonomes et les plus petites entreprises paient moins d’impôt. Coût de la mesure proposée par la cheffe Dominique Anglade, mardi: 550 millions de dollars (M$).
Le Parti libéral (PLQ) écarte par ailleurs l’idée d’imposer une surtaxe aux propriétaires de grosses cylindrées s’il prend le pouvoir, une suggestion de Québec solidaire pour lutter contre les gaz à effet de serre (GES).
Québec solidaire parle aussi de fiscalité, mardi, en visant à piger dans les poches des plus fortunés de la société. Un gouvernement solidaire irait chercher annuellement 2,65 milliards $ de revenus supplémentaires dans la poche du «5%» des citoyens les plus riches avec un impôt sur la succession et un impôt supplémentaire sur «les grandes fortunes».
Le parti de gauche estime que les Québécois les plus fortunés doivent contribuer davantage au financement des missions de l’État. La mesure prévoit un impôt de 0,1% supplémentaire pour les citoyens qui ont un actif net de 1M$ à 10M$.
Au Parti québécois, on s’intéressait plutôt mardi au développement économique régional. En tournée en Gaspésie, le chef, Paul St-Pierre Plamondon, a promis qu’un éventuel gouvernement péquiste renforcerait massivement l’enveloppe dédiée au développement des infrastructures régionales.
Un gouvernement péquiste voudrait consentir 11 milliards $ de plus en 10 ans pour combler le retard dans les investissements en infrastructures dans les régions et donner à celles-ci davantage de pouvoirs avec un nouveau ministère du Développement régional.
«Ça signifie des dizaines de projets importants en infrastructures qui n’ont pas lieu. Ça veut dire également des écoles qui ne sont pas mises à niveau, des routes mal entretenues, des bâtiments patrimoniaux qui sont laissés à l’abandon», a ajouté Paul St-Pierre Plamondon.
À la recherche du vote des anglophones, le chef du Parti conservateur du Québec (PCQ), Éric Duhaime, de passage à Montréal, a fait une nouvelle sortie contre la loi 96, qu’il juge liberticide envers les anglophones et leurs droits fondamentaux. Selon lui, cette loi de promotion du français au Québec n’a fait qu’exacerber les tensions avec la communauté anglophone.
Un éventuel gouvernement conservateur abolirait carrément la loi 96, lui préférant des mesures incitatives et un mode de sélection des immigrants plus susceptibles d’apprendre le français.
M. Duhaime voudrait par ailleurs rapatrier du gouvernement fédéral les pleins pouvoirs en matière d’immigration.
Mode d’examen
Le chef caquiste, François Legault, s’était engagé au printemps 2018 à réformer le mode de scrutin dans un premier mandat, de manière à y inclure une composante proportionnelle. Mais il y a renoncé. C’est ce qu’est venu lui reprocher mardi le Mouvement démocratique nouvelle (MDN), qui a qualifié de «méprisants» des propos tenus récemment par M. Legault.
Selon ce dernier, la réforme du mode de scrutin n’intéresse pas la population en général.
Dans un bref message publié mardi sur les réseaux sociaux, le Mouvement qui s’emploie à ce que le Québec dispose d’un mode de scrutin respectueux de la volonté populaire ajoute que la déclaration du premier ministre sortant heurte toutes les personnes et les organismes qui se sont unis pour réclamer depuis des années un mode de contrôle différent.
Mais même si M. Legault reconnaît toujours qu’il y a des «avantages» au mode d’examen proportionnel, il estime qu’actuellement «ce n’est pas une priorité pour les Québécois».
En prévision de l’élection générale du 3 octobre prochain, le MDN a envoyé une lettre aux différents partis politiques pour connaître leurs intentions à l’égard de la réforme du mode de scrutin. L’organisme dirigé par un ex-ministre du Parti québécois (PQ) et ancien président de l’Assemblée nationale, Jean-Pierre Charbonneau, dévoilera à la mi-septembre les réponses fournies par les partis.